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Le médiateur territorial

 
Management - Métiers

Christophe Trehet

Par sa capacité à faire naître l'écoute et le dialogue, il fait émerger des décisions collectives au sein d'un groupe où se côtoient des intérêts divergents : un métier qui commence à trouver sa place dans les structures.

Construire des projets, établir un état des lieux partagé d'un territoire, prendre des décisions acceptées par l'ensemble des acteurs présents sur un territoire, aussi divers voire antagonistes que soient leurs intérêts. Une gageure pour qui se donne la peine d'affronter honnêtement cet objectif, a fortiori lorsqu'il s'agit de gérer un espace naturel. Voilà la mission qui est confiée au médiateur territorial.

« La médiation territoriale, c'est une façon de travailler qui s'impose de plus en plus », observe Guy Castagné, du cabinet de conseil Akina stratégies. Dans un pays de tradition centraliste où le principe de participation des citoyens s'est diffusé progressivement depuis les années 1970, « il est aujourd'hui difficile d'imposer une idée localement, il faut la co-construire pour la faire accepter », poursuit-il. Le terme de médiation fut jusqu'à présent plutôt connu et usité pour des interventions dans le domaine social, avec la médiation familiale par exemple, mais « lier médiation et territoire, c'est assez récent en fait » notet- il, « même si la médiation territoriale nomme des façons de faire qui existaient déjà, notamment dans le développement local. »

« Le médiateur met en oeuvre des espaces de dialogue afin que les gens discutent, réfléchissent et élaborent des modalités de gestion concertée », explique pour sa part Marie Eraud, chargée de mission à l'Institut de formation et de recherche en éducation à l'environnement (Ifree). Selon les contextes et les types de ressources, et la place laissée par le médiateur, le pouvoir accordé au groupe d'acteurs mobilisés peut varier d'une simple consultation à la formulation d'avis qui rentreront pleinement dans le processus de définition des modalités de gestion.

QUALITÉS RELATIONNELLES

Le médiateur territorial doit avant tout disposer, selon Guy Castagné, « de qualités relationnelles, telles que l'écoute, le sens de l'adaptation, la capacité de permettre à chacun de s'exprimer, de fédérer, de faire avancer un groupe dans une réflexion et vers un consensus » mais aussi, plus classiquement, « de curiosité et d'un esprit de synthèse ». Une certaine expertise sur les ressources qu'il s'agit de gérer est un plus, car « il ne s'agit pas d'animer pour animer, il faut produire un résultat dans un temps donné ! », prévient-il.

Autant de compétences qui ne s'acquièrent pas véritablement sur les bancs d'une école mais se récoltent plutôt par l'expérience d'animation. Des formations courtes ou longues sont désormais consacrées au métier de médiateur territorial, tandis que d'autres incluent des éléments sur la médiation. La personne désireuse de renforcer ses compétences en la matière trouvera également des repères au sein de groupes d'échanges entre acteurs de la concertation, à l'image par exemple de l'Institut de la concertation.

Le médiateur territorial devra également faire preuve d'une capacité à dénouer des conflits. Pour certains, il s'agit même là du coeur de son métier : « les travaux sur le dialogue territorial distinguent en fait, au sein des personnes qui animent des dialogues entre acteurs, celles qui n'ont pas d'intérêt propre dans la gestion (on parle alors véritablement de médiateur), et celles moins neutres qui portent un intérêt qui leur est spécifique (on parle alors plutôt d'animateur territorial) », précise Marie Eraud. Les animateurs d'espaces naturels ont des intérêts dans un processus collectif de gestion. Il est finalement compliqué pour eux d'accompagner vraiment le travail de concertation. « À moins qu'une autre personne représentant l'espace en question, un directeur par exemple, prenne en charge ce rôle », suggère-telle.