La fréquence des micro-habitats sur les arbres est-elle vraiment liée au mode de gestion ?

 

Espaces naturels n°36 - octobre 2011

Le Dossier

Frédéric Gosselin
Cemagref
Yoan Paillet
Cemagref
Patrice Hirbec
ONF
Nicolas Debaive
RNF

Une étude du Cemagref livre ses premiers résultats ; surprenants : la fréquence des micro-habitats dépend moins du mode de gestion que des caractéristiques des arbres.

La non-exploitation favorise une partie de la biodiversité forestière menacée par la gestion forestière traditionnelle, peut-on lire dans la littérature scientifique. En France, pourtant, les connaissances sur cette question font défaut, notamment pour les groupes taxonomiques a priori les plus sensibles à l’exploitation car liés à des micro-habitats particuliers : champignons et insectes du bois mort, mousses…

Surprise. Contre toute attente, les premiers résultats d’un travail mené dans le cadre du projet Gestion forestière, naturalité et biodiversité1 (GNB) ont permis de montrer que la fréquence des micro-habitats sur les arbres dépend davantage des caractéristiques des arbres que du caractère exploité ou non du peuplement.
Les chercheurs français s’attendaient plutôt à observer, comme leurs collègues allemands, un plus faible nombre de micro-habitats en forêt exploitée qu’en forêt non-
exploitée ; une fois prises en compte les caractéristiques des arbres, et l’identité du massif forestier.
Étonnamment, ce n’est pas le cas : un arbre en forêt non-exploitée contient en moyenne entre 7 % de moins et 1 % de plus de micro-habitats qu’un arbre aux caractéristiques similaires en forêt exploitée ; les deux arbres sont donc très similaires pour ce qui est de leur nombre de micro-habitats. L’interprétation nécessite cependant quelques précautions.

Pourquoi ? Ces résultats peuvent, par exemple, refléter une attention portée au maintien d’arbres à micro-habitats lors des coupes d’entretien des parcelles exploitées. Ils peuvent également être liés à un arrêt d’exploitation récent des forêts non-exploitées ou à des forêts exploitées non représentatives des forêts françaises. En tout état de cause, ils supposent de mettre en place un suivi temporel.
Mené par le Cemagref, l’ONF, RNF et l’Inra, le projet GNB vise à mieux comprendre la réponse de sept groupes taxinomiques (mousses, champignons, insectes coléoptères saproxyliques et carabiques, plantes vasculaires, chauves-souris et oiseaux) à l’arrêt de l’exploitation forestière et à différents indicateurs de biodiversité dans plusieurs massifs forestiers français. En effet, si l’on souhaite privilégier ces pans de biodiversité, il faudrait savoir s’ils sont sensibles à certains descripteurs de structure forestière souvent utilisés comme indicateurs (quantité de bois morts…) ou, avant tout, à la distinction entre forêts exploitées et non
exploitées.
Les résultats seront aussi utiles pour l’évaluation des nouvelles productions forestières tel le bois énergie.

1. Le projet GNB utilise un protocole de suivi des forêts standardisé, déployé dans le réseau des réserves naturelles et biologiques depuis 2005.
nicolas.debaive-rnf@espaces-naturels.fr