Adaptation des outils - Guyane

« Pour la sécurité des agents, une formation spécifique au milieu tropical »

 

Espaces naturels n°31 - juillet 2010

Le Dossier

Michel Cantou
Président d’Innovaqua

 

Immense mer végétale dont la démesure peut inquiéter, la forêt équatoriale amazonienne ne présente pas plus de menaces que n’importe quel autre milieu extrême. Sa dangerosité cependant est liée à la richesse du contexte naturel qui expose l’agent à une variété de situations techniques et environnementales.
Dans ce milieu tropical humide, l’eau est omniprésente, les cours d’eau sont quasiment les seules voies de communication et nécessitent de maîtriser des savoir-faire spécifiques. Sur terre, la densité de la forêt peut amener à se perdre. L’agent devra savoir progresser, s’orienter, connaître les dangers et apprendre à survivre en situation d’isolement. Il devra aussi posséder des notions médicales et de premiers soins.
Début février 2010, cinq jours de stage inscrits au catalogue de l’Atelier technique des espaces naturels et organisés par Innovaqua visaient à faire progresser la sécurité des agents évoluant en milieu tropical. Les compétences croisées de six personnes ont été nécessaires pour répondre aux besoins de quinze stagiaires originaires des parcs de Guadeloupe, de Guyane et amazonien.

Outre la description d’une carte IGN et de ses courbes de niveau, des exercices de déplacement en forêt visaient à savoir utiliser une boussole, orienter une carte, intégrer la Déclinaison magnétique rapportée (DMR) ; sans compter la maîtrise des astuces permettant de s’orienter avec le soleil, les cours d’eau, la montre, etc.
Lors d’exercices pratiques, des équipes de quatre personnes ont évolué en forêt démontrant, grande leçon de l’atelier, que se perdre peut rapidement devenir une réalité.
L’installation des bivouacs a également fait l’objet d’un atelier. Comment choisir son emplacement, monter le hamac, le protéger de la pluie, le sécuriser en élaguant au ras du sol pour éviter d’être exposé aux piqûres d’insectes ou aux animaux la nuit venue ? Enfin, apprendre à allumer un feu. Essentiel en milieu humide, il réchauffe, rassure, protège et n’est pas évident à réussir.
Face à certaines situations, la formation s’est faite médicale. Le docteur Nicolas Heran a expliqué la composition d’une trousse de survie, le brancardage de fortune, la réanimation cardio-respiratoire.

Unique voie de communication, exception faite de l’hélicoptère, l’eau représente une des principales causes d’accidents en forêt : par noyade.
L’habileté des piroguiers à manœuvrer détermine la sécurité du groupe. Le passage d’un saut par exemple est une manœuvre très technique. Non-navigable au moteur, l’endroit est jalonné de pierres et le débit du fleuve est tel que la configuration apparaît comme un torrent bouillonnant. La mise en œuvre a mis en exergue quelques points de sécurité à améliorer tel le fait, avant le saut, de troquer ses lourdes chaussures de marche contre d’autres, plus légères, permettant de nager en cas de chute.
Mais ici comme ailleurs la réussite d’une mission passe par une planification de l’objectif et des moyens humains et structurels à mettre en œuvre : désigner un chef de mission, lister le matériel nécessaire, les moyens de transport, les rations alimentaires, les réserves d’eau, etc. Étudier la cartographie du parcours, identifier les obstacles, envisager le timing de progression, prévoir les lieux de bivouacs, convenir d’un contact régulier avec l’employeur par téléphone satellitaire, etc. La sécurité est l’art d’anticiper.