Estuaire de la Loire

Culture et nature cohabitent sur site sensible

 
Accueil - Fréquentation

Fabrice Normand
Conservatoire du littoral
Philippe Sauvage
Conservatoire du littoral
Franck Latraube
LPO Loire-Atlantique
Astrid Gingembre
Le Voyage à Nantes

Faire cohabiter nature, accueil du public et culture dans un espace naturel sensible, c’est possible. Retours d’expériences sur l’Observatoire de l’estuaire de la Loire.

Du haut de ses treize mètres, l’Observatoire domine les prairies estuariennes. Œuvre de Tadaski Kawamata, architecte japonais, la tour en bois et sa rampe d’accès résultent de l’initiative du Lieu unique1, organisme nantais dédié à la diffusion de la culture. L’artiste a été inspiré par ces anciens bras de Loire, sédimentés par la chenalisation du fleuve et recolonisés par la prairie ou la roselière. L’Observatoire permet de contempler la Loire.
En 2006, le Lieu unique souhaite mettre en place une biennale d’art contemporain. Elle propose la réalisation d’une œuvre au Conservatoire du littoral sur les prairies humides de Lavau-sur-Loire.

Projet culturel. Séduit, l’établissement apporte son soutien financier. Les partenaires discutent des conditions d’accès en respect avec la gestion du site. Ainsi, on s’y rendra à pied, par une route déjà existante. La circulation automobile est réglementée.
En 2007, le chantier réunit une quinzaine d’étudiants du monde entier. Le projet est travaillé en partenariat avec l’École supérieure du bois. C’est un succès : au cours de l’été, plus de 20 000 visiteurs sont comptabilisés. Et, dès 2009, un projet plus ambitieux voit le jour : une passerelle en bois de 750 m doit établir une liaison pédestre entre le bourg de Lavau-sur-Loire et l’Observatoire. Cheminant à 40 cm au-dessus des prairies, étiers et roselières, le promeneur s’immergera dans la nature.
Le prolongement de l’ouvrage suscite la méfiance. Ainsi, les agriculteurs s’inquiètent de ce cheminement qui coupe en deux entités les prairies qu’ils exploitent. Le tracé sera donc modifié afin de diminuer les surfaces soustraites à l’exploitation agricole. Aujourd’hui, les interférences du public sur les activités cynégétiques ou agricoles sont quasi inexistantes. Les chasseurs se sont astreints à des règles de sécurité contraignantes ; la canalisation du public sur la passerelle dissuade d’ailleurs les promeneurs de toute divagation. En revanche, la profession agricole, à l’origine assez réservée sur le projet, s’est appropriée l’œuvre.

Impact. Reste alors la question du dérangement de la faune. Une étude2 s’attache à comparer les effectifs de passereaux paludicoles chanteurs de la zone traversée et ceux d’une zone échantillon, non soumise au dérangement. La recherche conclut à l’absence d’effet significatif. A contrario, l’installation de la passerelle a permis d’exclure de toute exploitation agricole régulière des zones de prairies : la roselière à phragmite a aussitôt recolonisé ces milieux et accueille aujourd’hui diverses espèces de fauvettes paludicoles nicheuses. Désormais, les naturalistes utilisent fréquemment le site : la tour permet d’observer et de dénombrer dans d’assez bonnes conditions les oiseaux hivernants sur la réserve de chasse et de faune sauvage attenante.
La réalisation de l’Observatoire de Lavau-sur-Loire démontre qu’il est possible d’envisager un accueil du public de qualité dans un site naturel sensible. Un large partenariat a permis d’échanger regards et compétences entre l’univers professionnel de la nature et celui de la culture. Aujourd’hui, l’Observatoire est intégré à un circuit d’œuvres d’art au sein de l’estuaire de la Loire.

1. Devenu en 2011 Le Voyage. • 2. Confiée à l’ONCFS ainsi qu’à la LPO Loire-Atlantique.