Que faire ?

 
Occupation illicite du domaine public

Espaces naturels n°8 - octobre 2004

Droit - Police de la nature

Chantal Gil
Avocate spécialisée en droit public

 

II convient tout d’abord de déterminer la domanialité publique d’un terrain ou d’un immeuble. En l’absence de qualification législative officielle, une dépendance du domaine public se reconnaît à trois critères : soit elle appartient à une personne publique, soit elle est affectée à l’usage de tous, soit elle est affectée à l’usage d’un service public après avoir fait l’objet d’un aménagement spécial en vue de cet usage. On notera que la jurisprudence est très peu exigeante quant à la réalité de l’aménagement : une simple chaîne barrant une allée a été jugée comme constituant un aménagement entraînant la domanialité publique. Ce critère étant démontré, la personne de droit public, comme tout justiciable, ne peut se faire justice elle-même. Il est donc nécessaire de constater l’occupation illicite et concomitamment, afin de gagner du temps, de sommer l’occupant de déguerpir (constat d’huissier, sommation de déguerpir par huissier).
Ces préalables effectués, seule la juridiction administrative peut être saisie suite à une décision du Tribunal des conflits en date du 24 septembre 2001 (Sté B. E Diffusion c/RATP et Sté Promo Métro n° 3221).
L’article L. 521-3 du code de Justice administrative prévoit « en cas d’urgence, et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative ».
En vertu de l’article précité, le propriétaire peut donc solliciter l’évacuation de la dépendance occupée sous trois conditions : la condition d’urgence, la condition d’utilité, la condition de l’absence d’obstacle à l’exécution d’une décision administrative.
La condition d’urgence. Au regard des décisions jurisprudentielles, nous pouvons constater que l’urgence est démontrée lorsque nous rapportons la preuve de ce que l’occupation illicite est de nature à créer une situation dommageable difficilement réversible, voire dangereuse.
La condition d’utilité. Le propriétaire public devra démontrer que l’occupation illicite rend impossible soit l’aménagement, soit la réalisation de la mission poursuivie ayant justifiée l’acquisition de la parcelle ou immeuble.
La condition de l’absence d’obstacle à l’exécution d’une décision administrative. Par définition, l’occupation illicite démontrée ne peut être justifiée par aucune décision administrative.
En conclusion, le simple fait de constater l’occupation illicite n’est pas suffisant pour obtenir une ordonnance de référé. Le propriétaire public doit démontrer la réunion des trois conditions sus-énoncés.
En amont, nous conseillons, sur des terrains faisant l’objet fréquemment d’occupations illicites, de procéder à des aménagements spéciaux ayant pour but d’éviter l’intrusion d’occupants causant souvent des dégradations (labour de terrains, tranchées pour éviter le passage de véhicules, etc).