Le paysage : rencontre entre culture et nature
Gérer un site classé, c'est concevoir ensemble le paysage que l'on souhaite partager. À Bibracte au mont Beuvray, Grand Site de France, cette co-construction passe par un comité de gestion où culture et nature sont associées.
Le paysage du mont Beuvray, l’un des sommets du Morvan, n’a cessé d‘évoluer en fonction des usages que l’homme en a fait, comme l’ont précisé les recherches archéologiques intensives dont fait l’objet depuis 1985 ce site une ville gauloise abandonnée depuis deux mille ans. Ces recherches vont de pair avec la volonté d’accueillir du public et avec une double protection en tant que monument historique (1985) et site classé (1990). Depuis 1990, les lieux ont été profondément transformés : construction d’un musée qui sert de porte d’entrée au site, ouverture de clairières afin de permettre des chantiers de fouille et de rendre plus lisible la topographie de la ville gauloise, restauration de vestiges architecturaux (laissés à l’air libre ou protégés par un abri), équipement de parcours de visites.
Dans le même temps, la gestion forestière a pris une tournure nettement plus active, avec des objectifs à la fois paysagers, de préservation de la biodiversité (retour à une forêt mixte irrégulière dans le cadre d’un contrat Natura 2000) et économiques (contribuer autant que possible à l’économie de l’établissement gestionnaire du site). Toutes ces initiatives contribuent à créer un nouveau paysage qui est le reflet des nouveaux usages du lieu, tout comme le paysage fermé du XX e siècle et le paysage nettement plus ouvert du XIX e siècle étaient l’expression des contextes socio-économiques bien différents de leur époque, à dominante pastorale pour le premier et sylvicole pour le second.
Ce nouveau paysage en devenir est le résultat d’une concertation permanente entretenue par le gestionnaire du site, l'EPCC Bibracte (Établissement public de coopération culturelle), avec ses tutelles et ses partenaires (Dreal, Drac, ABF, PNR Morvan, ONF) au sein d’un comité de gestion du site. De cette concertation, qui est enrichie par l’expertise d’un paysagiste, est issu un plan de gestion paysagère à long terme qui a constitué la fondation du dossier de labellisation au titre des Grands Sites de France, intervenue en 2008, et qui sert de cadre d’élaboration et d’arbitrage de tous les projets qui affectent les lieux, comme les chantiers de fouille ou les coupes de bois, en amont de leur instruction par les services de l’État.
Le renouvellement du label, en 2014, a permis d’élargir les ambitions en s’intéressant aux marges et aux abords du site classé – en quelque sorte à une « zone tampon » où les terrains, mi-agricoles, mi-forestiers, sont entre de multiples mains privées. Pour ce faire, la gouvernance du Grand Site a été ajustée grâce à une implication plus forte du Parc naturel régional du Morvan aux côtés de l’EPCC Bibracte, dans le cadre d’une convention pour la gestion durable du Grand Site, et à la mobilisation des chercheurs du laboratoire ITEM (Innovation et Territoires de Montagne), afin de renforcer la concertation avec les habitants, les « socio-professionnels » et les élus, dans le but de concevoir ensemble le paysage que l’on souhaite partager dans les décennies à venir.