Pas de médiocre compromis

 

Espaces naturels n°35 - juillet 2011

Édito

Patrick Blandin
Président d'honneur comité français de l'UICN

Aucun parc n’est une île, No park is an island. En publiant cet article il y a une trentaine d’années, l’écologue américain Daniel Janzen mettait l’accent sur les multiples interactions entre les systèmes écologiques d’une aire protégée et ceux de l’extérieur.
Or, voici que nos « îles » sont aujourd’hui appelées à devenir les nœuds de trames colorées. Écologie du paysage à l’appui, elles sont appelées à dessiner sur nos cartes le pendant « nature » des réseaux de routes et voies ferrées. En d’autres termes, des infrastructures écologiques.
Langage d’aménageur ? Pourquoi pas, après tout ! Il s’agit bien d’aménagement du territoire.
La nouvelle Stratégie nationale pour la biodiversité1 arrive, plus accessible à tous que la précédente, espérons-le. Il s’agit de penser la place que notre société désire donner à la nature et à la diversité de ses composantes, dans notre territoire. Pas des petits aménagements, compromis médiocres où l’on sauverait de l’artificialisation quelques sanctuaires, îlots du désespoir, mais un aménagement intégré assurant une judicieuse imbrication des espaces de nature et de nos constructions… et un chevauchement fonctionnel d’infrastructures dont une catégorie a pour ancienne habitude de rompre la continuité de l’autre.

Ainsi, les espaces protégés ne risqueraient plus de devenir des îles, refuges consentis aux plus ardents amoureux de la nature, mais des sources. Sources, au sens écologique, c’est-à-dire des espaces d’où les espèces doivent pouvoir diffuser, grâce aux trames, en fonction de leur dynamique propre, ou en réponse au changement environnemental. Sources, au sens métaphorique, pour l’imaginaire et pour la curiosité de tous.
Dans ce contexte, s’investir pour que les espaces protégés, au cœur des infrastructures écologiques, soient toujours davantage une chance pour l’avenir et une source de mieux-être pour chacun, c’est assurément une belle façon de faire en sorte que la Stratégie nationale pour la biodiversité ait vraiment du sens. •

1. Présentée le 19 mai dernier, la Stratégie nationale pour la biodiversité doit donner un cadre aux politiques publiques en faveur de la biodiversité pour les dix années à venir. Réponse de la France à la Convention sur la diversité biologique, elle décline les objectifs fixés par la communauté internationale dans le Plan stratégique de la convention sur la diversité biologique à Nagoya (Japon) en octobre 2010.