Les Lozériens inventent leur méthode pour suivre l’état de conservation de la végétation
Espaces naturels n°33 - janvier 2011
Mario Klesczewski
CEN du Languedoc-Roussillon
Evelyne Mothais
DDT de la Lozère
L’enjeu : développer une méthode partagée pour l’évaluation et le suivi des habitats contractualisés d’intérêt communautaire. • La solution : une méthode basée sur des indicateurs en lien avec les pressions qui s’exercent sur les habitats.
La directive Habitats-Faune-Flore introduit une notion nouvelle en écologie de la végétation : l’état de conservation des habitats naturels dont elle impose l’évaluation. Elle en précise la méthode à l’échelle biogéographique mais pas à l’échelle locale. Afin de développer un tel outil, la direction départementale des territoires de la Lozère, appuyée par les partenaires locaux, se lance dans une démarche concertée.
En toute logique, le comité technique de pilotage s’intéresse tout d’abord à la manière dont procèdent les autres pays membres de la communauté européenne. L’Allemagne et l’Autriche, les nations les plus avancées en la matière ont opté pour une même méthode : de simples grilles, composées d’indicateurs chiffrés et reproductibles permettant de définir trois niveaux d’état de conservation (bon, moyen, défavorable).
L’ensemble des indicateurs est destiné à évaluer : la structure de l’habitat, sa composition, les dégradations visibles non reflétées par la végétation (voir tableau).
Après discussion, la Lozère adopte cette méthode en choisissant de l’adapter au contexte local.
Chaque habitat d’intérêt communautaire présent en Lozère donne lieu à l’établissement d’une grille d’évaluation. C’est à l’occasion de sorties sur des parcelles en contrat Natura 2000 (sur les sites de Margeride, du Valdonnez, du Galeizon), que le groupe teste la pertinence de ces grilles. Il vérifie notamment que chaque indicateur retenu est en lien direct avec une pression identifiée. Ainsi par exemple, alors que l’indicateur « présence d’espèces patrimoniales » est souvent proposé, celui-ci n’est pas retenu.
En cause ? Les facteurs conditionnant la présence de ces espèces ne sont pas précisément connus. Il existe en effet des parcelles en excellent état et pourtant sans espèce particulière. A contrario, certains groupements dégradés abritent des taxons rares.
In fine, on note que les indicateurs validés et les seuils retenus sont souvent identiques quel que soit l’habitat.
Contrairement aux deux pays cités, qui calculent la note moyenne sur l’ensemble des trois critères, la démarche lozérienne teste une méthode de notation dite communautaire : sur chaque unité de gestion de l’exploitation agricole, la note finale est celle de l’indicateur le moins bien noté. De cette façon, le facteur de dégradation prépondérant est mis en évidence et le dialogue avec le gestionnaire sur la définition de mesures adaptées est facilité. Par ailleurs, la variation de ces pourcentages reflète mieux l’état réel des habitats que la note unique demandée actuellement par l’Europe.
Enfin, l’approche en pourcentage permet de s’adapter à d’autres échelles (site, région, pays, Europe). Toutefois, d’autres critères doivent également être pris en compte pour évaluer l’état de conservation des habitats naturels à ces différentes échelles.
Les tests effectués à l’échelle de l’unité de gestion montrent que la méthode est efficace tout en restant fondée sur une approche scientifique et précisément documentée de la qualité écologique du groupement. Autre avantage : les grilles renseignées constituent un « état zéro » de chaque habitat d’intérêt communautaire dans chaque parcelle. Et si la mise en œuvre et l’interprétation des données nécessitent la mobilisation de compétences spécialisées, le suivi est simple et rapide.
Aujourd’hui, la méthode n’est pas totalement validée. Elle devrait être mise en œuvre sur l’ensemble des sites du département cette année.