Vous êtes "septique" ?

 

Espaces naturels n°9 - janvier 2005

Le Dossier

Nicolas GÉRARDIN
Parc national de Port-Cros

 

Par un beau matin de juillet 2004, un arrêté secoue quelque peu les flots assagis de la belle bleue. De fait, cette réglementation interdit purement et simplement l’accès au Parc national de Port-Cros à tous les navires non équipés d’un réservoir à eaux noires, soit 99,9 % de la flotte !

L’arrêté, qui émane conjointement de l’amiral préfet maritime en Méditerranée et du maire de la commune d’Hyères-les-Palmiers, précise (art. 1.5) « quatre zones de mouillage propre [sont définies] dans une zone de 600 mètres autour de Port-Cros et de Bagaud. Dans ces quatre zones, seul est autorisé le mouillage des navires qui respectent les normes de propreté édictées par l’arrêté ministériel n° 96.611 du 4 juillet 1996 […] et qui sont effectivement équipés de réservoirs fixés ou mis en place à titre temporaire pour recevoir les déchets organiques ».
Même si elle n’a pas pour habitude de consulter le Journal officiel, la gent plaisancière fut quelque peu troublée (presque autant que l’eau elle-même) par cette formulation sans nuance.
Pourtant cette décision ne visait pas la mise en vigueur immédiate et brutale d’une contrainte législative nouvelle. La démarche avait avant tout vocation pédagogique, inspiratrice et incitative.
- Pédagogique : pour l’usager afin qu’il cesse d’ignorer qu’il n’est pas seul sur mer. En été, 120 000 bateaux évoluent entre Toulon et Saint-Tropez. Avec une moyenne de 4,5 occupants par bateau, ce sont 480 000 personnes qui produisent, chacune, 400 g de déjections naturelles par jour. Une ville moyenne sans fosses septiques ni station d’épuration est établie sur mer !
- Inspiratrice : pour les industriels qui ne peuvent continuer la politique de l’autruche. Ils ne pourront prétendre conserver le leadership mondial de la construction de bateaux de plaisance sans prendre en compte l’environnement marin.
Certains constructeurs étrangers ont déjà pris une avance notoire dans ce domaine.
- Incitative : pour les institutions et les collectivités publiques chargées de la gestion des ports et de la santé publique qui devront concevoir et mettre en oeuvre les équipements alternatifs se substituant au rejet en mer. Pas simple d’épurer des eaux souillées salées !
Si la protection de l’environnement de l’unique Parc marin français ne pouvait légitimer une telle démarche courageuse, quel autre horizon maritime lointain aurait pu l’inspirer ?
Heureux qui comme Ulysse a trouvé la raison…