Pour protéger l’espace marin,

 
prendre en compte ses particularités

Espaces naturels n°9 - janvier 2005

Le Dossier

Philippe le Niliot
Mission pour la création du Parc national marin d’Iroise
Jean-Louis Millo
Directeur du GIP des Calanques de Marseille
 

En France, la stratégie nationale pour la biodiversité comporte un volet consacré à la mer. Un tel plan nécessite la prise en compte des particularités de l’environnement marin pour appréhender les enjeux fondamentaux de sa conservation.

Tout d’abord, la mer est un milieu ouvert impossible à clore ni à isoler. La densité de l’eau salée lui permet de transporter sur de grandes distances, au gré des déplacements des masses d’eaux, les substances nutritives, les larves, des gamètes mais aussi certains éléments polluants. D’autres spécificités, institutionnelles celles-là, privilégient en mer le principe général de libre accès au milieu et pour tous (baigneurs, plongeurs, navires, pêcheurs)… L’eau de mer, la faune, la flore qui y vivent ont le statut de res nullius (qui n’appartient à personne) dans un domaine où le foncier n’existe pas. C’est un espace sur lequel l’État est l’acteur majeur. Mais la mer est aussi transnationale : sans frontières physiques et gérée par des règles internationales. Enfin, le niveau de connaissance des milieux marins est globalement plus faible que celui de l’environnement terrestre : le fait qu’il soit caché sous la surface en est bien sûr la raison.
Pour autant, la mer reste un espace au patrimoine naturel méconnu mais remarquable. Elle est aussi très convoitée et soumise à beaucoup de pressions qui justifient la mise en place de processus de protection dont les Aires marines protégées sont un maillon indispensable. Pour être efficace, ces processus doivent prendre en compte les enjeux de conservation de l’environnement marin en intégrant trois grandes problématiques.
En premier lieu, une problématique de protection des sites et des espèces sensibles. Non maîtrisée, la fréquentation littorale estivale, estimée à 30 millions de personnes par an en France, met en péril les espèces sensibles au dérangement.
La seconde problématique est l’usage de la gestion des ressources marines exploitables dans un contexte général de raréfaction… Le maintien en bon état des biocénoses1 marines est une nécessité économique et environnementale : pour assurer une fonction économique de production de ressources vivantes, mais aussi de conservation de la biodiversité.
Enfin, le maintien de la qualité de l’eau est sans doute l’enjeu le plus délicat car les sources potentielles de pollution se situent souvent en dehors et parfois très loin de l’espace protégé. La mer est une « matière première indispensable » dont on utilise beaucoup les capacités d’épuration et sur laquelle pèsent des risques de pollutions intentionnelles et accidentelles.
Confrontées à des situations différentes d’un bout à l’autre des côtes françaises, les Aires marines protégées ont développé leurs propres outils. Ce dossier présente quelques exemples de gestion qui aboutissent à la protection de l’environnement marin et participent à la conservation de sa biodiversité.

1. Ensemble des êtres vivants d'un biotope ou d'une station donnés (le Robert).