Les sols dans les politiques publiques : une lente implantation
Espaces naturels n°72 - octobre 2020
Nolwenn Bougon,nolwenn.bougon@ofb.gouv.fr, Thomas Eglin,thomas.eglin@ademe.fr, Flavien Poinçot,flavien.poincot@acta.asso.fr
Bien qu’encore insuffisante au regard de l’enjeu, la reconnaissance des sols dans les politiques publiques internationales, européennes et nationales progresse. Tour d’horizon.
Face à l’absence d’organe international de gouvernance des sols, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a créé en 2012 un partenariat mondial sur les sols. Ouvert aux gouvernements, aux organismes publics et privés, et à la société civile (ONG, associations, etc.), il est appuyé par une instance d'experts internationaux (Intergovernmental technical panel on soils). De nombreuses ressources produites dans ce cadre sont accessibles en ligne1.
La France ne dispose pas d'une politique nationale sur les sols mais ils ont gagné en importance dans les politiques publiques notamment liées à la transition écologique.
Au niveau européen, un projet de directive-cadre sur la protection des sols a été discuté de 2006 à 2014. Les raisons avancées
pour son abandon sont le coût élevé de l’approche, des dispositions existantes dans d’autres dispositifs européens et une capacité trop restreinte des États membres à défi nir les modalités de mise en oeuvre sur leur territoire2. En 2020, le Pacte vert pour l’Europe porté par la commission européenne a cependant remis en avant les sols. Ainsi, la stratégie « De la ferme à la table3 » promeut notamment la séquestration de carbone dans les sols et leur préservation, tandis que la stratégie « Biodiversité à l'horizon 20304 » prévoit un renforcement des actions de l’UE pour restaurer les sols dégradés, prévenir leur dégradation et préserver leurs fonctions. En France, il n’existe pas de politique nationale dédiée aux sols mais ils ont gagné en importance dans les politiques publiques de tous les secteurs, surtout en matière de transition écologique et de lutte contre le changement climatique. Le projet agro-écologique pour la France de 2012 a par exemple amené à la création en 2014 des Groupements d’intérêts économique et environnemental - collectifs d’agriculteurs reconnus par l’État dont certains placent le sol au coeur de leurs travaux. Publiée en 2018 dans le cadre du plan climat, la feuille de route pour l’économie circulaire inclut la préservation de la qualité des sols dans son volet agricole. Introduite en 2015, la stratégie nationale bas carbone qui vise à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 promeut quant à elle la séquestration de carbone dans les sols. Elle s’appuie notamment sur les plans climat-air-énergie territoriaux, imposant aux collectivités de plus de 20 000 habitants d’élaborer un diagnostic et un plan d’action pour cette séquestration. Outil d’aide à l’atteinte des objectifs climatiques, le label Bas Carbone défi nit depuis 2019 un cadre de certifi cation volontaire offrant des perspectives de financement à des projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de séquestration de carbone. Autre exemple, le plan Biodiversité de 2018 intègre plusieurs objectifs concernant les sols tels que la lutte contre l’érosion, la promotion des solutions fondées sur la nature ou l’objectif Zéro artificialisation nette5 (Zan). Un groupe d’experts coordonné par le Cerema travaille à l’élaboration d’une défi nition de l’artifi cialisation qui pourra être intégrée au code de l’Urbanisme en vue de l’atteinte du Zan.
1) www.fao.org/global-soil-partnership/fr
(2) La bonne gestion des sols agricoles : un enjeu de
société - CESE, 2015
(3) bit.ly/ferme-table
(4) bit.ly/eu-biodiversity-2030
(5) bit.ly/rapport-zero-artifi cialisation-nette-pdf