Réconcilier ressource fourragère et biodiversité ? Un casse-tête !
Comment réintroduire une activité pastorale pérenne répondant aux enjeux des éleveurs et des structures en charge de la gestion des sites ? Dans le Parc naturel régional (PNR) de la Narbonnaise en Méditerranée, on utilise le plan de gestion pastoral.
Au XVIIIe siècle, les troupeaux étaient la principale richesse des villages ; ils sont aujourd’hui quasiment disparu des paysages du PNR de la Narbonnaise en Méditerranée. Les arguments en faveur de la réintroduction de l'activité pastorale sont nombreux : maintien des milieux ouverts, protection contre l'incendie, maintien des mosaïques paysagères. Mais les obstacles sont aussi importants : faible valeur fourragère des garrigues méditerranéennes, un foncier morcelé, de nombreux conflits d’usages (entre éleveurs, propriétaires, chasseurs, sportifs), et bien sûr la difficulté du métier (cf. Bergère des Corbières p.16).
Comment réintroduire une activité pastorale pérenne répondant aux enjeux des éleveurs et des structures en charge de la gestion des sites ? Grâce au soutien financier de l’Union européenne et du département de l’Aude, cette réflexion a été pleinement engagée à l’échelle d’un territoire : le massif de la Clape, site classé par l’État en 1976, site Natura 2000 et massif à forte pression incendie. Le document définissant les modalités techniques de gestion pastorale au service des enjeux du site, est devenu un véritable outil d’aide à la décision des élus et des propriétaires locaux.
Plusieurs expertises préalables ont été nécessaires :
• évaluation des potentialités pastorales du massif de la Clape et scénarii de gestion ;
• analyse des priorités en termes de biodiversité : espèces patrimoniales, habitats naturels d’intérêt européen, connectivités à créer ou restaurer ;
• analyse de l’intérêt de l’activité pastorale sur les zones de cloisonnement pour la lutte contre l'incendie ;
• étude des potentialités sylvo-pastorales.
Ainsi, grâce à l’analyse croisée des travaux de l’Organisme inter-établissements du réseau des chambres d’agriculture du Languedoc-Roussillon, des chercheurs (Cefe-CNRS), du CEN Languedoc-Roussillon, du Service départemental d’incendies et de secours (SDIS), de l’ONF et du PNR, plusieurs secteurs favorables du massif et le type d’exploitations à accompagner ont pu être identifiés. La concertation engagée a permis de recenser les différents outils disponibles pour sécuriser les exploitants et propriétaires, mais a également permis d’aboutir à un cahier des charges spécifique pour chaque zone pastorale identifiée.
Depuis la validation de ce document, le Parc a accompagné un éleveur installé en Saône-et-Loire souhaitant réaliser une transhumance sur le site. Il a été orienté vers un secteur identifié grâce au plan de gestion pastorale. Les cahiers des charges ont été affinés en fonction des exigences des différents propriétaires (trois domaines viticoles et l’Armée de l’air), de l’éleveur et des acteurs cynégétiques. Ainsi des prêts à usage ont été signés. Sur une seconde zone identifiée, l’installation d’une bergère ayant l’appui d’une commune est en cours. Reste la longue phase de concertation à engager, afin de préciser les modalités de pâturage. Mais, au vu des premières difficultés et malgré son souhait de s’installer sur le site à l’année, elle devra sûrement repartir en estive.
Pour la suite, l'ambition du Parc et du président de l’AOC viticole « La Clape » reste de pouvoir installer durablement des exploitants afin d’entretenir ce site merveilleux et de valoriser les produits.