Politique agricole commune

une question de survie

 
Management - Métiers

France Drugmant
Chargée de mission agriculture à la Fédération des Parcs
Marie-Odile Neurrisse
Stagiaire à la Fédération des Parcs d’avril à octobre 2004
 

La Politique agricole commune évolue. La réforme vise à adapter l’agriculture au contexte économique international tout en intégrant un développement plus durable. La responsabilité de sa mise en œuvre appartient aux États. Ce qui change…

Le compromis de Luxembourg, du 26 juin 2003, instaure de nouvelles règles 1 pour une Politique agricole commune. S’agissant du premier pilier (organisation des marchés), les modalités de financement du secteur agricole sont profondément modifiées. Contrairement au système actuel, les aides ne seront que partiellement liées au type de production. La plupart des paiements directs seront donc forfaitisés et remplacés par un Droit à paiement unique à l’exploitation (DPUE) dont les modalités de mise en œuvre sont définies par chaque pays membre. C’est ce que l’on appelle le découplage des aides.
La responsabilité de la mise en œuvre de la réforme appartenant aux États, la France a pris des options qui bouleversent le moins possible la situation des agriculteurs, mais qui complexifient le système :
- Un découplage le plus partiel possible. La France appliquera le découplage dès le 31 décembre 2005. La commission européenne autorisant dans certaines limites, de maintenir le couplage (le lien entre l’aide et la production), la France a choisi de maintenir ce lien au maximum autorisé par les textes.
Par exemple, les cultures SCOP (surfaces de céréales, d’oléoprotagineux et de jachères aidées) restent couplées à 25 %. Cela signifie que pour percevoir 100 % de l’aide qu’il percevait avant la réforme l’agriculteur doit continuer les mêmes productions. S’il fait un autre choix de
production, il n’en percevra plus que 75 % (bien évidemment, sur les surfaces concernées par les cultures SCOP).
- Un calcul fondé sur la référence historique. Le calcul du DPUE 2 se fait sur la base d’une référence historique individuelle, représentant la moyenne des aides directes perçues par l’agriculteur entre 2000 et 2002. La France aurait pu choisir comme l’Allemagne de baser ce calcul sur une répartition moyenne à l’hectare (par région).
- Mise en place d’un mécanisme de transfert des DPUE et de taxation stricts afin de répondre à trois objectifs : freiner les comportements spéculatifs, éviter la déprise, favoriser l’installation. Ces objectifs sont renforcés par la mise en place d’une réserve nationale permettant de corriger les déséquilibres éventuels entre agriculteurs.
Offre soumise
à conditions
La réforme subordonne l’octroi des DPUE au respect de normes découlant de dix-neuf règlements et directives (neuf à compter du 1er janvier 2005), au respect de bonnes conditions agricoles et environnementales, et au maintien des prairies permanentes (ce que l’on appelle la conditionnalité). En cas de manquement avéré, le montant de la DPUE des agriculteurs sera réduit proportionnellement à la gravité de la violation. Ils ont tous reçu, fin décembre 2004, deux livrets explicatifs. La conditionnalité sur Natura 2000 a, quant à elle, été repoussée à 2006.
Par ailleurs, une réduction progressive des aides directes aux grandes exploitations 3 (3 % en 2005, 4 % en 2006 et 5 % dès 2007) permettra de financer le développement rural (deuxième pilier de la PAC).
Enfin, un mécanisme de discipline financière vise à maintenir les dépenses agricoles dans les limites budgétaires décidées au Conseil européen d’octobre 2002 (plafond fixé à 45 milliards d’euros/an jusqu’en 2013 4). Son objectif est de financer l’adhésion des dix nouveaux États membres sans réduire les ressources disponibles pour l’actuelle Union européenne des quinze.
Le développement rural
L’accord de Berlin (1999) avait créé un modèle agricole européen reposant sur deux piliers : le premier consacré au soutien des marchés, le second dédié au développement rural.
Ce dernier connaît aujourd’hui un projet de réforme (projet de règlement du 14 juillet 2004) présentant deux objectifs : un renforcement et une simplification de la politique de développement rural. Sa mise en application s’opérera dès 2007.
Tandis que les mesures existantes du règlement 1257/1999 sont maintenues et, notamment, l’Indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) 5 et les Mesures agro-environnementales 6, le règlement 1783/2003 instaure un nouveau mécanisme. Il incite les agriculteurs à la qualité, les soutient dans le respect des normes, les aide s’ils décident de s’engager dans des mesures supplémentaires. Un système de conseil agricole est destiné à accompagner les agriculteurs volontaires pour leur permettre de satisfaire aux exigences de la conditionnalité. Les États membres doivent le mettre en place au plus tard le 1er janvier 2007. Il pourrait devenir obligatoire à partir de 2010.
Simplification
Le projet de réforme envisage également une réorganisation des vingt-deux mesures de développement rural selon trois axes :
- Axe 1. Amélioration de la compétitivité des secteurs agricole et forestier : amélioration du potentiel humain, restructuration du potentiel physique, mesures transitoires pour les nouveaux États membres. Un minimum de 15 % de l’enveloppe nationale doit être consacré à cet axe.
- Axe 2. Aménagement de l’espace (utilisation durable des terres agricoles -qui permettra notamment un financement accru des zones Natura 2000, utilisation durable des terres sylvicoles) : au minimum 25 % de l’enveloppe nationale.
- Axe 3. Diversification de l’économie rurale, amélioration de la qualité de vie en milieu rural, acquisition de compétences et animation : au minimum 15 % de l’enveloppe nationale.
Ces axes devront intégrer ce qu’il est convenu d’appeler « l’approche Leader », laquelle comprend des priorités territoriales et thématiques en matière de développement rural pour chaque axe, de même qu’une approche ascendante (local/national/communautaire).
Cette simplification sera également assurée par le Feader 7, désormais unique instrument de financement de la politique de développement rural, abondé à hauteur de 12,7 milliards d’euros/an.