Préserver ressource économique et biodiversité
L'industriel Evian est impliqué dans la protection du territoire de naissance de l'eau embouteillée via une association. Ses objectifs sont de protéger durablement la ressource, et donc les milieux, en prenant en compte les risques liés aux activités anthropiques.
Les sources d’eau minérale naturelle bénéficient d’une efficace protection géologique (voir ci-dessous). Néanmoins, la préservation absolue, à long terme, de leur pureté et de leur stabilité, requiert la prise en compte des risques liés aux activités anthropiques (agriculture, habitat, gestion forestière…). Depuis plus de 20 ans, un programme d'actions a été développé afin de préserver la pureté de l’eau Evian, sans freiner le développement économique local.
Si la biodiversité n’est pas la cible initiale des politiques mises en oeuvre, les programmes de maîtrise des risques et préservation des milieux naturels ne peuvent que l’impacter de manière favorable. L’Apieme (Association pour la protection de l’impluvium * de l’eau minérale Evian) a été créée en 1992 dans ce but. Les experts des organismes de gestion de la nature sont associés et pourraient à l’avenir jouer un rôle fort dans l’accompagnement d’actions locales à la fois liées à l’activité économique et contribuant à la sauvegarde des écosystèmes locaux.
L'Apieme est issue d’un partenariat public- privé entre la SA des eaux minérales d'Evian et les 13 communes concernées par la ressource. Depuis plus de vingt ans, l'association décline ses actions selon trois objectifs phares :
• maintenir une agriculture forte et respectueuse de l’environnement ;
• préserver les milieux naturels et notamment les zones humides ;
• accompagner un développement territorial raisonné.
L’IMPLUVIUM DÉSIGNÉ SITE RAMSAR
En 2011, l'Apieme et la Communauté de communes du pays d’Evian ont souhaité dresser un inventaire de la biodiversité du territoire. Ce diagnostic sur deux ans a mobilisé les experts locaux : LPO 74, Frapna, Asters, Chambre d'agriculture, avec le soutien de l'Agence de l'Eau, du Conseil départemental et de la Région Rhône-Alpes. Sur l’impluvium, les surfaces en forêts, zones humides et prairies sont indispensables à la recharge du gisement d'eau minérale et font donc l’objet d’une attention particulière. Or, la faune et la flore témoignent de l'état de ces milieux naturels. Les espèces animales et végétales sont dépendantes des pressions que l'homme exerce sur ces espaces et sont donc révélatrices des conditions de gestion du milieu. La diversité des cortèges d’oiseaux inféodés aux milieux agricoles est par exemple le reflet du degré d’intensivité d’exploitation des prairies.
L'Apieme entend tirer parti de ces connaissances pour évaluer l'efficacité de ses plans d'actions : par exemple, comment la diversité floristique et entomologique des prairies va-t-elle évoluer avec le projet de méthanisation Terragr’Eau ?
L’impluvium d’Evian comprend une centaine de zones humides de 1 à 30 hectares. On y rencontre la quasitotalité des types de milieux humides existant dans les Alpes du Nord : étangs, prairies humides, bas-marais alcalins, tourbières à sphaignes… De par leur diversité, ces zones humides développent une grande richesse en termes d'habitats et d'espèces (9 espèces protégées au plan national et 14 au plan régional). Depuis 2003, le Sivom du pays de Gavotapplique un plan de gestion dans le cadre d'un contrat Natura 2000 pluriannuel avec l’appui du Conservatoire des espaces naturels Asters. 145 hectares de marais et tourbières sont concernés. Depuis sa création, l’Apiemeapporte un soutien annuel de 50 000 euros au Sivom pour la réalisation d’études et travaux complémentaires et pour l’animation d’actions de valorisation des zones humides. Ces actions sont indispensables à la conservation de ce patrimoine naturel exceptionnel.
En 2008, la désignation de l’impluvium d'Evian en tant que site Ramsar constitue une reconnaissance internationale de la valeur écologique du site, mais aussi de la politique de protection menée depuis plusieurs années.
UN PROJET COLLECTIF POUR UN PASTORALISME DURABLE
Plus de la moitié de l'impluvium est occupé par des prairies agricoles. Pour cela, l’Apieme et le monde agricole coopèrent depuis plus de 20 ans pour le développement de pratiques performantes et respectueuses de l'environnement. Ce partenariat est entré dans un tournant majeur avec le projet Terragr’Eau qui repose sur deux volets complémentaires :
• la construction en 2015 d'une unité de méthanisation-compostage collective ;
• l’organisation du retour au sol des matières fertilisantes issues de l’unité.
L’objectif principal est la préservation de la qualité des milieux naturels et de l'ensemble des ressources en eau.
Le site Terragr’Eau traitera les effluents de 41 fermes de l’impluvium : fumiers, lisiers, eaux issues de la fabrication du fromage… Soit près de 40 000 tonnes par an. Lors de la méthanisation, les matières organiques seront transformées par une suite de réactions biologiques en conditions contrôlées (absence d’oxygène, température). Il en résultera la formation d’un biogaz et d’un digestat. Le biogaz, énergie verte, sera injecté dans le réseau de gaz GRDF. Quant aux digestats, ils seront valorisés comme engrais naturels sur l'impluvium. Leur épandage sera raisonné, de manière collective, par une coopérative regroupant les 41 agriculteurs, l’Apieme et la SA Evian. La vocation de cette structure sera de mobiliser tous les outils nécessaires à la parfaite maîtrise et à la traçabilité des épandages. Á l’échelle du territoire comme à celle de chaque exploitation agricole, un bilan de fertilisation va permettre de résoudre tous les problèmes potentiels liés à la répartition des engrais, et notamment les risques de pollution par les nitrates.
À travers la SA Evian et le Fonds Danoneécosystème, l’industriel assume 40 % des coûts d’investissements pour la construction du site et 56 % des coûts annuels de fonctionnement de la coopérative. La région, le département, le Feder et l’Ademe apportent également leur soutien aux investissements pour un total de 27 %.
PLANS DE GESTION DIFFÉRENCIÉE POUR LES ESPACES VERTS
Un autre programme contribue à la préservation des milieux, il vise à supprimer le recours aux pesticides pour l’entretien des espaces verts communaux. Sept communes de l’Apieme sont engagées. L’Apieme a missionné une experte paysagiste pour réaliser un plan de gestion différenciée des communes. Le plan de gestion décrit les méthodes adéquates pour un entretien écologique de chaque espace vert : techniques de désherbage mécanique, choix des plantations, recours au paillage, etc. L'objectif est la suppression des pesticides dans un délai de 5 ans.
Pour officialiser leur engagement, les communes signent la charte régionale « Objectif zéro pesticide dans nos villages », animée en Haute-Savoie par la Frapna.
En parallèle, l'Apieme et l’association art-terre ont co-construit le programme « Jardins Verts » visant à diffuser auprès des habitants des méthodes de jardinage respectueuses de l'environnement.
Pendant un an, onze jardiniers amateurs de l’impluvium ont été formés par des intervenants professionnels : compostage, plantes potagères locales, connaissance du sol… Ces jardiniers sont aujourd’hui prêts à accueillir les habitants intéressés afin de partager ces bonnes pratiques.
(*) Le terme impluvium désigne la zone d'alimentation de l'eau minérale naturelle. Pour Evian, en Haute-Savoie, il s’agit d’un territoire compris entre 800 et 1200 mètres d’altitude, entre la rive sud du Lac Léman et les premiers sommets des Alpes. Sur les 35 km² de l'impluvium, près de 15% des précipitations (pluie et neige) s'infiltrent en profondeur et circulent pendant plus de 15 ans au sein des multiples couches géologiques qui composent le sous-sol.