Plus encourageant qu’il n‘y paraît…

 
Édito

Robert Barbault
Directeur du département Écologie et gestion de la biodiversité au Muséum national d’histoire naturelle • Président du conseil d’orientation de l’Aten

2010. La biodiversité sauvée ? Pas tout à fait, mais la situation est plus encourageante qu’il n’y paraît.
La cible, fixée en 2002, de réduire significativement les pertes de biodiversité pour 2010 n’a pas été atteinte ; les pressions n’ont pas fléchi et les milieux naturels continuent de « reculer ». Bref, le déclin de la biodiversité se poursuit au rythme excessif et préoccupant, dénoncé, entre autre, par le Millennium ecosystem assessment.
Est-ce dire que sommets planétaires, conférences et engagements internationaux n’accouchent que de vaines paroles ? Sincèrement et sans naïveté, je ne le crois pas. Penser en ces termes serait de courte vue. En effet, l’objectif 2010 a mobilisé largement et en profondeur. Il s’est produit ce qu’il faut considérer comme un investissement de fond et ses effets, quoique peu perceptibles immédiatement, se feront sentir sur la durée – c’est bien là l’important.
D’abord une mobilisation prometteuse, du monde associatif et des milieux de la protection de la nature. Ensuite, des acquis réels, concrets, tels que la loi de 2006 sur les parcs nationaux, qui modernise leur conception et leur fonctionnement pour en faire des projets partagés par les populations concernées sans céder sur l’exigence de protection dans les zones cœurs ; la création de l’établissement Parcs nationaux de France et de l’Agence des aires marines protégées ; et la perspective de nouveaux parcs nationaux et marins. J’y ajouterai un travail des réseaux d’espaces protégés, qui coordonnent de plus en plus et, j’espère, de mieux en mieux, leurs politiques et leurs actions.
Le réseau national qu’ils constituent est appelé à jouer un rôle croissant dans la définition et la conduite des stratégies nationales de conservation de la nature et le récent document publié dans la Lettre des réserves naturelles éditée avec Terre sauvage et intitulée « Contribution à une stratégie de création d’aires protégées. Vers un réseau écologique national » rend bien compte de cette dynamique.
En conclusion, l’année internationale de la biodiversité s’ouvre sur ce constat encourageant : le capital social représenté par les réseaux humains intéressés à la nature s’est sérieusement renforcé, dans le monde comme dans notre pays. Atout fort précieux pour faire face aux défis qui persistent !
Le moment est donc venu pour que la biodiversité passe du statut sympathique de priorité verbale à celui de priorité véritable, c’est-à-dire financée. N’est-on pas dans un monde où l’argent mesure la valeur des choses ?