Oiseaux d'outre-mer, une conservation à renforcer d'urgence
De nombreuses espèces d'oiseaux endémiques des territoires d'outremersont aujourd'hui menacées d'extinction, comme le confirme la dernière mise à jour de la liste rouge UICN. Quelle est la situation ?
Elle n'est pas brillante... Voyez plutôt : mille-cinq-cents espèces d'oiseaux sont observées en France. Parmi elles, plus de six-cents se situent en Guyane et deux-cents dans des sites insulaires avec beaucoup d'endémisme. Autrement dit, la diversité de l'avifaune française se localise majoritairement dans les territoires d'outre-mer. Et 80 % des espèces d'oiseaux considérées en danger sont ultramarines. Citons l'exemple du Busard de Maillard (appelé aussi papangue) : il s'agit du dernier rapace nicheur de La Réunion, sa population est estimée à cent-quatre vingts couples, tous sur l’île.
Pourtant, 80 % des plans nationaux d’actions sur les espèces d'oiseaux sont développés en métropole. Il y a une exacte inversion des priorités. Et ce, alors que le statut de préservation de nombreuses espèces d'oiseaux d'outre-mer n’est pas encore connu...
Quelles menaces pèsent sur les oiseaux d'outre-mer?
En premier lieu, il faut citer la prédation par les rats et autres espèces introduites. Cette faune a en effet évolué dans des habitats dépourvus de prédateurs ; l'arrivée de ces derniers a donc généré de graves problèmes. De plus, ces espèces sont souvent plus sédentaires qu'en métropole ; elles n'ont donc pas pu échapper à ces prédateurs en colonisant d'autres espaces.
Les oiseaux d'outre-mer subissent aussi la pression particulièrement forte de l'urbanisation, de l'aménagement, de l'agriculture et de la chasse. Reprenons l'exemple du Busard de Maillard. On sait que trois menaces le mettent en danger : l’empoisonnement par l’ingestion de rats empoisonnés, les collisions avec des câbles électriques et le braconnage. Ce qui distingue encore les espèces ultramarines de celles vivant en métropole, c'est qu'elles produisent en général moins de jeunes. Le moindre impact sur leur environnement ou directement sur leur population a donc des répercussions d'autant plus fortes.
Ceci étant dit, l’optimisme est de mise au vu des actions mises en oeuvre par nos partenaires ultramarins et de leurs résultats encourageants.
En quoi consistent ces actions ?
Une opération aux résultats très prometteurs vient par exemple de se terminer dans l'archipel des Gambier, en Polynésie. BirdLife International, la SOP-Manu-Société d’ornithologie de Polynésie et Island Conservation y ont notamment mené pendant deux ans des piégeages de rats et de chats, prédateurs de quatre espèces d'oiseaux parmi les plus rares au monde, dont la Gallicolombe erythroptère (Alopecoenas erythropterus, appelée localement Tutururu). Des espèces végétales introduites y ont aussi été détruites car elles modifiaient les habitats de ces oiseaux. La logistique de cette opération, organisée sur cinq îles toutes très distantes de Tahiti, a été très lourde. Mais les efforts ont payé, car plus aucun prédateur introduit n'est présent sur ces îles ! Ce projet a en plus bénéficié d'un soutien de la population locale car il a entraîné une hausse de la production de noix de coco dont les boutons et jeunes fruits étaient souvent consommés par les rongeurs.
L'expertise dans le domaine de la conservation des oiseaux en milieu insulaire demeure peu développée à ce jour en France. Mais nos homologues britanniques ou néo-zélandais ont avancé sur le sujet et nous partageons leurs connaissances pour les appliquer en outre-mer, comme dans le cadre du programme CAP DOM1 qui s’est conclu en 2015 et sera réédité sur des thématiques de conservation en outre-mer.