Avant-propos

 

Espaces naturels n°60 - octobre 2017

Le Dossier

Bénédicte Lefèvre, Thierry Mougey et Christian Ringot

Dossier piloté par Bénédicte Lefèvre Afie, Christian Ringot Eden62, François Salmon FCEN.

Rien ne se perd, tout se transforme. © Arnaud Bouissou - Terra

Rien ne se perd, tout se transforme. © Arnaud Bouissou - Terra

En écrivant la maxime « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », Lavoisier, paraphrasant Anaxagore, ne pensait sans doute pas à la question du devenir des produits de la gestion des milieux naturels ! Que faire de la matière produite par les opérations d'entretien ou de restauration ? Dans la nature, il n’y a que des cycles, tout déchet est une matière première. La notion moderne d’économie circulaire ne fait que nous le rappeler.

Qu’est-ce qu’un « produit de gestion » dans un espace naturel ? Essentiellement des végétaux issus de la fauche et de la taille, de la « matière animale » issue du pastoralisme, de la matière organique type boues de curage1… mais aussi des produits plus « originaux » comme des espèces exotiques envahissantes. Un agriculteur ou un forestier se doit de trouver un devenir aux produits de sa gestion, dont une partie est la raison même de son travail. Pour que son activité économique « tourne », il doit, au maximum, réduire les coûts et augmenter les recettes. Force est de constater que les gestionnaires d’espaces naturels protégés semblent se poser différemment la question, mettant en avant l’intérêt général de la préservation de la biodiversité, leur objectif prioritaire. Pourtant, la question résonne avec celle, plus que jamais d’actualité dans un contexte budgétaire tendu, de la « performance » (efficience…) du service public.

Par ailleurs, au-delà de l’enjeu « biodiversité », le contexte nécessite de plus en plus de s’interroger sur l’empreinte écologique de toute action et notamment de ses effets sur le climat, par le biais des émissions de gaz à effet de serre. Intégrer ce facteur peut aboutir à des solutions techniques de gestion des milieux naturels différentes, et donc, à un devenir nouveau des produits de leur gestion, voire à des produits d’un autre type.

Exporter de la matière végétale pour maintenir « pédologiquement pauvre » un milieu naturel « écologiquement riche », comme nous le rappelle Françoise Duhamel (lire l'article "Intérêts de la fauche exportatrice"), semble une évidence pour tout gestionnaire de milieux naturels. Mais c’est très loin d’être le cas dès que l’on sort de notre cercle professionnel. Cela nécessite d’expliquer au grand public la raison pour laquelle la nature dégradée ou fragile ne se débrouille pas toute seule. Enfin, valoriser les produits de gestion est aussi une façon de s’insérer dans son territoire. Cela peut générer des relations avec les acteurs du territoire2, nécessiter des matériels adaptés et induire un retour positif sur la gestion du site.

(1) Lire Espaces naturels n°51, article sur le marais de Brière.
(2) Lire Espaces naturels n°38, article sur le roseau.