Économie

Espèces invasives : valoriser ou détruire ?

 

Espaces naturels n°60 - octobre 2017

Le Dossier

Marine Bontemps, AFB

L'écrevisse de Louisiane bénéficie, dans le lac de Grand-Lieu, d'une autorisation de vente. Les pêcheurs participent ainsi à la régulation. Cette valorisation permet de soutenir les démarches contribuant au retour à l'équilibre.

La pêche permet de contenir l'expansion de l'espèce.

La pêche permet de contenir l'expansion de l'espèce.© Jean-Marc Gillier

Les premières observations de l'écrevisse de Louisiane sur le lac de Grand- Lieu (Loire-Atlantique) ont été faites en 1999, et la population n’a cessé d’augmenter depuis, jusqu’à un pic en 2006 (plusieurs tonnes récoltées) entraînant de nombreuses modifications du milieu. L'invasion a pu être stabilisée à partir de 2007, au moment de l'autorisation de pêche et de vente par les pêcheurs locaux.

Des prélèvements étaient auparavant effectués, et les écrevisses détruites sans contre-partie. En effet, même si son arrivée a permis à la Spatule blanche de mieux se porter, la détérioration de la végétation aquatique risquait de causer le départ des Guifettes moustac, entre autres. Or les prédateurs ne suffisaient pas à endiguer le développement de l'espèce.

Dans le même temps, les pêcheurs avaient constaté que la forte densité d’écrevisses endommageait les filets et abîmait les poissons, les rendant invendables. Dans un contexte de restriction européenne de pêche à l'anguille, l'opportunité de vendre des écrevisses pouvait constituer un nouveau revenu. « La mise en place de la vente représente alors un revenu annexe, permettant aux pêcheurs de trouver un équilibre économique, diminuant également la pression sur l’anguille », déclare Jean-Marc Gillier, conservateur*, sans illusion sur l'éradication de l'écrevisse envahissante.

Un arrêté préfectoral limite les conditions de vente. Elle n'est possible que sur le département, avec une limitation de taille de maille de filet. Les stocks vendus et les clients concernés sont recensés et communiqués aux services de l'État.

La mise en place a pu se faire facilement car les pêcheurs n'avaient pas à se procurer de matériel particulier. Les circuits également sont classiques. Chaque pêcheur gère son stock : soit en vente directe, cuite, sur les marchés, soit en vente à des restaurateurs ou transformateurs.

En complétant le rôle des prédateurs, les pêcheurs permettent de contenir l'expansion de l'espèce. En cela, ils font un véritable travail de gestion de l'espace naturel. En contre-partie, ils bénéficient d'une ressource qui leur procure des revenus complémentaires une partie de l'année.

* Le lac de Grand-Lieu est géré par la Société nationale de protection de la nature (SNPN).