>>> Office national de la chasse et de la faune sauvage

Police de la nature

 

Espaces naturels n°7 - juillet 2004

Droit - Police de la nature

Michel Catusse
Ingénieur, délégué de l’ONCFS pour la région Rhône-Alpes

 

Parmi les missions de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) : la police de l’environnement. Vaste domaine, qui englobe la police de la chasse, celle de la pêche, la réglementation des espaces protégés ou le respect de la loi sur l’usage des 4X4. Un rôle de gendarmes de la nature auquel les agents de l’ONCFS s’identifient pleinement.

Pour le grand public, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, c’était le garde-chasse, ennemi juré du braconnier. Aujourd’hui, le statut de cette profession a grandement évolué et les gardes-chasses sont devenus des techniciens et des agents techniques de l’environnement, au même titre que les personnels des parcs nationaux et du Conseil supérieur de la pêche. L’Office de la chasse, établissement public relevant du ministère de l’Écologie et du développement durable, se consacre à trois grandes activités :
• la recherche appliquée sur la faune sauvage et ses milieux ;
• le développement, c’est-à-dire la gestion des réserves, les plans de gestion et la réglementation ;
• et enfin, la police de la chasse, sa mission historique.
Ces missions sont complémentaires et visent une gestion durable de la faune sauvage. Les missions de police recouvrent principalement le contrôle du permis de chasse, l’application des plans de chasse ou de prélèvement, et le respect des règles de sécurité dans le maniement des armes de chasse. Dans la pratique, l’Office est de plus en plus engagé dans des missions élargies de police de la nature.
Cette dimension répressive de l’ONCFS constitue une spécialisation puisque les agents des parcs nationaux ou du Conseil supérieur de la pêche sont davantage tournés vers la gestion, le développement ou l’animation. En milieu rural, les agents de l’ONCFS sont très souvent sollicités par les maires qui les préfèrent au gendarme dès lors qu’il s’agit de verbaliser. Il est d’ailleurs difficile de conjuguer, à effectifs constants, une demande répressive qui conforte la légitimité de l’Office et la préservation des activités de recherche et de développement, elles aussi nécessaires.
Une stratégie judiciaire s’impose
Les agents assermentés de l’Office peuvent constater les infractions et rédiger des procès-verbaux cependant le procureur de la République demeure seul juge de la suite réservée à la procédure.
Mais que pèse le braconnage d’un canard lorsque ce même procureur a en charge des affaires de meurtres ?
C’est pour contrer cette difficulté que l’Office développe une politique de relations avec les parquets qui se concrétise par la signature de conventions. Celles-ci définissent les principes et méthodes de travail, elles arrêtent les objectifs répressifs, la présentation des dossiers et surtout la programmation d’audiences spécifiques des tribunaux de police ou correctionnels. Par ailleurs, dans chaque département, l’Office désigne un « correspondant parquet » qui assiste aux audiences spécialisées environnement et apporte son expertise au juge. Cette présence physique aux audiences favorise l’explication orale, bien plus efficace que de longs rapports techniques.
Destinataires, de par les textes, d’une copie des procès-verbaux, les associations de chasseurs peuvent se constituer partie civile afin d’appuyer la démarche de l’ONCFS. Ce renforcement se traduit par un relèvement du niveau des sanctions. On notera par exemple qu’un jugement récent a infligé une amende de 1900 euros pour un lièvre abattu hors plan de chasse.
Volonté et réalité
Pour répartir ses effectifs et gérer la multiplicité des intervenants, l’Office se concentre sur les espaces où il est seul et n’opère que rarement sur les territoires dotés d’équipes spécifiques. Toutefois, les agents de l’Office sont régulièrement sollicités par les gestionnaires d’espaces naturels pour des actions conjointes. Mobiles, armés et formés aux interventions délicates, ils viennent alors renforcer les équipes locales de police de l’environnement. Ils opèrent aussi en forêt domaniale, car l’Office national des forêts privilégie la gestion des milieux et n’intervient que rarement en matière de police. Les agents de l’ONCFS ont compétence sur l’ensemble du territoire national, y compris sur les secteurs soumis à une réglementation particulière, tels les parcs nationaux ou régionaux.
L’efficacité de la police de l’environnement tient notamment à la coordination des intervenants. C’est d’ailleurs ce que prévoit la loi « Barnier », de février 1995, qui confie aux préfets une mission d’animation transversale inter-administrations. Cette compétence s’est traduite par des opérations intéressantes, telle la surveillance des bivouacs dans les gorges de l’Ardèche, le contrôle de la chasse au gibier d’eau en Dombes et dans le Rhône ou la coordination des échanges d’informations avec les parcs nationaux et les réserves naturelles. Cependant, ce texte est demeuré d’application limitée. On peut même affirmer qu’il est en perte de vitesse. C’est pourquoi l’Office défend le principe de la création d’instances départementales de coordination des établissements et organismes responsables de la police de l’environnement. La future loi sur la ruralité pourrait aller dans ce sens.
Les équipes de l’ONCFS collaborent aussi avec la gendarmerie et les douanes. Cette coopération est à la fois naturelle et obligée puisque les agents de l’Office ne sont pas officiers de police judiciaire, ce qui limite leurs capacités d’intervention aux seules opérations en flagrant délit. Mais la situation pourrait évoluer prochainement et dès à présent des agents suivent une formation d’OPJ. « Devenir des officiers de police judiciaire et élargir nos capacités d’intervention… », cette vieille revendication exprime l’attachement des agents de l’ONCFS à leurs missions de police.