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La biodiversité dans les forêts publiques

 

Espaces naturels n°7 - juillet 2004

Le Dossier

Jean-Marc Brezard
Direction technique « biodiversité forestière », ONF

 

En France métropolitaine, l’ONF gère 30 % de la forêt. À ce titre et comme tout gestionnaire d’espaces naturels, l’Office porte une réflexion sur les conditions de maintien de la biodiversité.

Avec 1,8 million d’hectares de forêt domaniale et 2,7 millions d’hectares de forêt appartenant à des communes, l’ONF gère 30 % de la forêt française de métropole. Or, le contrat signé entre l’État et l’ONF en 2001 détaille les actions en faveur de la biodiversité1 :
• renforcement du réseau des Réserves biologiques intégrales afin de le rendre représentatif de la diversité des habitats forestiers de la forêt domaniale ; création de trois Réserves biologiques intégrales de plus de 2000 ha (en plaine, en montagne, en région méditerranéenne) ;
• préservation la biodiversité « ordinaire »… Ce point est également important car il faut permettre aux écosystèmes de fonctionner et surtout d’évoluer dans la perspective de changements climatiques. Dès 1993, des directives pour une meilleure prise en compte de la biodiversité dans l’aménagement et la gestion forestière ont été données. Elles concernent en particulier les stades âgés (phases de déclin et de sénescence) trop souvent absents des forêts de production.
État actuel
Depuis dix ans, ces directives ont été précisées2. Mais le besoin d’une évaluation ainsi que d’intégration des nouvelles connaissances et des nouveaux concepts apparaissent nécessaires.
• La conservation d’arbres morts ou sénescents, d’arbres à cavités : elle est variable d’une forêt à l’autre. La peur des ravageurs, la sécurité du public, le souci de ne pas laisser perdre de matière utilisable ne serait-ce qu’en bois de feu, expliquent que certaines forêts de plaine sont très (trop) « propres ».
• L’îlot de vieillissement permet d’assurer un relais pour les espèces inféodées aux gros bois en conservant des arbres au-delà de l’âge d’exploitabilité économique ; sa présence est transitoire et il peut faire l’objet d’intervention dans un objectif de sécurité ou d’amélioration. Il vient en complément de la conservation d’arbres morts ou sénescents.
• Le concept d’îlot de sénescence est apparu récemment à la faveur de l’écocertification forestière PEFC3 et de l’élaboration des contrats forestiers Natura 2000. Ce dispositif permettrait de constituer pour au moins trente années (durée proposée pour le contrat entre le propriétaire et l'État) un stock de bois mort sous forme d’arbres disséminés ou en bouquets sans intervention.
Mise en œuvre
L’application sur le terrain se fait par :
• Une connaissance plus fine des habitats et des espèces de faune et de flore présentes dans la forêt lors des révisions d’aménagement ou sur les sites Natura 2000.
• La délimitation, dans l’aménagement, des zones hors production (séries d’intérêt écologique).
• La création, pilotée au niveau national, de réserves biologiques intégrales.
• La délimitation d’îlots de vieux bois dans les zones de production (îlots de vieillissement ou îlots de sénescence).
• La conservation des arbres sans valeur économique (arbres secs, foudroyés, arbres remarquables par leur esthétique ou leur histoire, chablis disséminés dont la récolte serait plus onéreuse que l’abandon).
• Des techniques d’exploitation respectueuses des sols, avec le maintien sur la coupe des rémanents d’exploitation.
Améliorer les connaissances
Pour améliorer la diffusion des connaissances l’ONF a officialisé l’existence de quatre réseaux de compétences naturalistes (avifaune, entomologie, mammifères non ongulés, mycologie). Il a noué des liens avec l’association Prosilva pour partager les expériences en matière de traitements irréguliers. La diffusion des connaissances est assurée dans la nouvelle revue « Rendez-vous techniques » qui publie des articles sur tous les thèmes relatifs à la gestion de la biodiversité en forêt. Elle est aussi dispensée par la formation continue en interne ou avec l’Aten et par l’élaboration de guides de sylviculture. La mise en œuvre de ces derniers sera assurée par des animateurs sylvicoles et un réseau de « martéloscopes », permettant au forestier de « doser son coup de marteau » en pensant production de bois, renouvellement de la forêt mais aussi biodiversité, paysage…

1. La Loi d’orientation forestière de 2001 a réaffirmé le rôle multifonctionnel de la forêt publique. Le contrat signé entre l’État et l’ONF précise les obligations et le programme d’actions pour la période 2001-2006.
2. Manuel d’aménagement (1997) ; instructions sur les Réserves biologiques dirigées (1995), sur les Réserves biologiques intégrales (1998), guide « arbres morts, arbres à cavités » (ONF Alsace 1999), guide reconstitution après tempêtes (2001).
3. Pan european forest certification.