Pastoralisme, quel devenir ?
Espaces naturels n°18 - avril 2007
Frédérique Permingeat
Institut de droit de l’environnement
La loi du 14 avril 20061 révise en profondeur le régime juridique des Parcs nationaux. L’importance de cette réforme invite à s’interroger sur ses conséquences à l’égard d’un certain nombre d’activités dont la législation antérieure admettait le maintien. C’est le cas du pastoralisme.
Adoptée le 14 avril 2006, la loi repense la structure des Parcs nationaux. Elle modifie ces établissements publics dans leurs dimensions institutionnelle comme territoriale ; elle touche également à leurs compétences et leurs moyens d’actions. Concernant le pastoralisme, observons, d’une part, que la loi confirme son statut d’activité privilégiée au sein des Parcs nationaux. Et, d’autre part, qu’elle modifie sensiblement les instruments dont les Parcs disposaient pour le réglementer.
Le pastoralisme reste, tout d’abord, une activité dotée d’un régime spécifique au sein des Parcs. En effet, l’article L. 331-4-12 maintient la distinction établie par la loi du 22 juillet 19603 entre activités pouvant être interdites et activités devant être réglementées. Autrement dit, l’exercice du pastoralisme doit être encadré juridiquement mais son existence ne saurait être remise en question.
Des dérogations au profit des activités pastorales permanentes comme saisonnières sont également prévues (articles L. 331-4-2 et R. 331-20 et 21). Les décrets de création des Parcs pourront ainsi autoriser, innovation non négligeable, des « activités commerciales nécessaires à un tourisme compatible avec les objectifs du Parc ». On pense, notamment, à la commercialisation de fromage, charcuterie ou autres produits du terroir4. Malgré ce régime relativement souple, l’exercice du pastoralisme n’est pas libre. Les Parcs nationaux disposent à son égard de plusieurs instruments de réglementation que la réforme de 2006 a sensiblement modifiés.
Le directeur perd ainsi le pouvoir réglementaire dont il jouissait en vertu des articles R. 331-35 et suivants. Il n’a désormais plus vocation à intervenir en matière pastorale comme autorité de police administrative (article L. 331-10). Cependant, les établissements publics des Parcs nationaux gardant le pouvoir de prévenir ou restaurer toute dégradation des écosystèmes (article L. 331-9), une réglementation du pastoralisme reste donc envisageable par ce biais. De même, la possibilité pour les Parcs de gérer certains biens des collectivités (ancien article R. 331-31) est supprimée au profit du dispositif de l’article L. 331-13 (affectation, à titre gratuit, d’immeubles dépendant des domaines public ou privé de l’État et des collectivités territoriales ou appartenant à leurs établissements publics). Les Parcs nationaux pourront ainsi devenir les gestionnaires directs de certains alpages.
Enfin, un nouvel instrument a été créé : la charte du Parc national (article L. 331-3) qui est expressément conçue, entre autre, comme un outil de réglementation du pastoralisme (article L. 331-4-1 alinéa 2). Elle devrait se traduire par une prise en compte accrue des exigences écologiques dans l’exercice des activités pastorales. Le respect de plans de pâturage pourra, par exemple, être prévu en concertation avec les personnes intéressées. Ils pourront ensuite être précisés, au cas par cas, au sein de conventions conclues avec les
propriétaires ou gestionnaires concernés (collectivités territoriales, ONF…). Elle devrait, d’autre part, faciliter la participation financière des Parcs à la réalisation de certaines opérations (héliportages, restauration de cabanes pastorales…), sous réserve toutefois du respect de la législation relative aux aides agricoles. L’article L. 331-9 les autorise en effet à attribuer des subventions destinées au « financement de projets concourant à la mise en œuvre de la charte du Parc ». Son efficacité reste partiellement conditionnée par la faculté des personnes publiques intéressées à collaborer.
1. Loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux Parcs nationaux, aux Parcs naturels marins et aux Parcs régionaux, JO du 15 avril 2006, p. 5 682.
2. Les articles cités sont tous, sauf mention contraire, issus du code de l’Environnement.
3. Loi n° 60-708 du 22 juillet 1960 relative à la création de Parcs nationaux, JO du 23 juillet 1960, p. 6 751.
4. Ces activités ne peuvent être conduites que par des agriculteurs ou des éleveurs.