Outils innovants pour site naturel
Espaces naturels n°43 - juillet 2013
Charles Dumoulin
Expert en valorisation du patrimoine naturel. Co-gérant d’Atelier nature. Administrateur de l’Association française des ingénieurs écologues
Smartphone, QR code, réseaux sociaux, blog… à quelles conditions les nouvelles technologies de l’information sont-elles de « réels » supports à la sensibilisation du public ? À partir de quand bascule-t-on dans un contexte où l’outil prime sur la nature ? Analyse d’expériences…
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) permettent de rendre l’information accessible d’à peu près n’importe où. Pour le promeneur, c’est la possibilité d’être introduit dans le monde de la biodiversité ordinaire. Pour le gestionnaire ou le scientifique, c’est la possibilité d’emmener sur le terrain des outils d’analyse qui affineront son expertise. Nous n’en sommes qu’aux balbutiements et si les applications NTIC paraissent séduisantes, il convient de les aborder avec recul pour limiter les erreurs liées à l’innovation.
Avec l’arrivée des géo-localisations, mp3, QR code, réalité augmentée, de nouvelles possibilités pour valoriser un milieu naturel émergent. En effet, le public peut d’abord être attiré par l’aspect aventure/jeu vidéo de l’outil. Il découvrira ensuite la nature, objet du contenu. L’offre du Lac des sapins de Cublize en est un parfait exemple : des jeux numériques sont disponibles à l’office de tourisme. Ces jeux, sous forme de chasse au trésor, valorisent les espaces naturels des abords du lac sans traiter directement de nature.
L’évolution des outils de médiation permet l’élargissement du public. La mise en œuvre des NTIC peut suivre des logiques radicalement différentes qui détermineront l’identité et l’attractivité d’un site. A minima, les NTIC peuvent faire office de panneau pédagogique dématérialisé : l’utilisation est informative. Le visiteur arrive à un point précis qui déclenche une explication (par GPS ou QR code). Il voit les informations sur un écran, plutôt que sur un panneau. Cela permet d’éviter des aménagements dans le milieu naturel, de faire évoluer les contenus ou d’en intégrer de plus riches (vidéos et sons). Ce choix a été fait par exemple par le conseil général des Pyrénées-Atlantiques à travers son application Nature 64.
Le coût de réalisation est peu élevé. Le manque de valeur récréative de l’approche explicative peut être considéré comme un inconvénient. Cette approche est pertinente pour des sites éloignés d’un point central (maison de site ou office), ou éloignés les uns des autres, ou encore quand l’embauche d’un animateur est impossible.
À l’opposé, les NTIC peuvent orchestrer une activité touristique complète. Une mise en scène, des objectifs à atteindre, des jeux, des actions à réaliser plongeront le public dans la découverte. Dans ce cas, les NTIC peuvent être combinées aux autres moyens de médiation tels que du matériel scientifique ou des livrets guides… Le fort potentiel récréatif et l’élargissement du public cible sont les raisons de cette approche. En revanche, le coût de réalisation est important et la réflexion doit aussi porter sur la commercialisation de la future offre. Certains se sont lancés. Le Laborando de Megève offre des clefs de détermination interactives sur tablettes tactiles, intégrées à des ateliers animés par un naturaliste. La randonnée est scénarisée par visioguide GPS, le tout combiné à un pack d’observation avec livret guide, parapluie japonais, boîte à insectes, appareil photo…
Cette approche est pertinente quand le site est à proximité directe d’un office de tourisme ou d’une maison de site, quand la fréquentation est importante et quand il est possible d’embaucher des animateurs.
Un dernier type d’utilisation des NTIC concerne la création d’outils non liés à un lieu précis. C’est le cas par exemple des clefs de détermination interactives. Ces outils sont souvent téléchargeables gratuitement. Mais il faut bien reconnaître des difficultés à l’usage : faites le test avec la Clés de forêts ou Fleurs en poche. Il est difficile de repérer les bonnes espèces… Des problèmes de compatibilité avec certains modèles de téléphones sont également observés. NatureGate est très abouti dans ce domaine mais n’est pas encore utilisable pour la flore de France. •