>>> Parc national de la Guadeloupe

Pas sans les populations locales

 
De l’écotourisme au tourisme durable

Espaces naturels n°25 - janvier 2009

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Jean-Sébastien Nicolas
Parc national de la Guadeloupe

 

Chutes du Carbet, Soufrière, Cascade aux Écrevisses… Destination Guadeloupe ! Au cœur du Parc national, transitent ainsi 500 000 visiteurs par an, invités à une visite responsable préservant les ressources et le bien-être des populations.
Le parc, pourtant, souhaitait dépasser cette notion d’écotourisme et s’orienter vers le tourisme durable. Un concept plus exigeant puisqu’il s’agit de « préserver à long terme les ressources naturelles, sociales et culturelles, contribuer au développement économique et à l’épanouissement des individus qui vivent dans ces espaces ».
La volonté est là mais le terrain est vierge ; en effet, au niveau local aucun document ne fait référence en matière de stratégie touristique. On est loin de pouvoir adhérer à la charte européenne1 du tourisme durable dans les espaces protégés. Aussi, du diagnostic au plan d’actions en passant par la stratégie, un long cheminement va être conduit. Il va durer trois ans et s’appuyer sur un travail partenarial avec les acteurs du territoire2. L’adhésion à la charte est actée en septembre 2007.

Mobiliser les acteurs. Après trente ans d’un développement touristique balnéaire de masse, la mobilisation des acteurs autour de notions telle la préservation des ressources naturelles, culturelles et sociales, n’avait rien d’évident. Aujourd’hui, avec le recul, on peut se demander comment la « mayonnaise » a réussi à prendre. Et s’apercevoir que la clé de voûte du succès repose principalement sur le choix de faire appel à un intervenant extérieur.
Choix judicieux. En effet, si l’on se resitue dans le contexte local, l’image du parc ne fait pas l’unanimité. Celle-ci s’impose auprès des populations locales comme la représentation d’une somme d’interdits ou de limitations des possibles. Avec un expert indépendant, le protocole de travail a gagné en crédibilité et en impartialité. Les agents du parc reconnaissent, sans effort, qu’ils n’avaient pas la compétence requise pour mener à bien un tel protocole mais aussi que « les acteurs du territoire ont pu s’exprimer d’autant plus librement qu’ils n’avaient pas, face à eux, un agent du parc ».
L’expert a été un médiateur comprenant les préoccupations des acteurs. Ces dernières étaient transmises au parc, peu habitué à entendre des points de vue parfois très durs.
Il est vrai que le consultant connaissait le territoire et, surtout, qu’il avait déjà œuvré pour le secteur touristique.
De petites choses simples, auxquelles le parc n’aurait pas pensé, ont permis à la confiance de s’établir. Pour exemple, le fait de retenir que les panneaux d’interprétation devaient se décliner en plusieurs langues, les acteurs du tourisme ayant expliqué que, dans les années à venir, le marché s’orienterait vers le continent nord-américain et qu’ils devaient se préparer à cette nouvelle donne.

Méthodologie. Plus de cinq cents personnes ont ainsi été consultées lors d’une enquête préalable, l’intervenant a ensuite dirigé les réflexions pendant des ateliers pour arrêter des pistes d’action : à titre d’exemple, celle des marins pêcheurs souhaitant mettre en place un label identifiant les produits de la pêche locale.
Cette phase a permis l’émergence de propositions innovantes comme l’accessibilité aux personnes handicapées ou encore un partenariat avec un tour-operator local… une première pour cet espace protégé.
Cent trente-cinq actions ont ainsi été identifiées et, pour les prioriser, les populations locales ont encore été associées : un questionnaire, publié dans la presse, leur demandait de les classer.
Échanger, se connaître, se comprendre… In fine, les trois années de travail pour aboutir à un plan d’actions partagé font figure de minimum nécessaire pour que des objectifs communs soient identifiés.

1. Elle s’inscrit dans les priorités exprimées par l’Agenda 21, adoptées lors du Sommet de la Terre (Rio) en 1992 et par le 5e programme d’actions communau-taires pour
le développe-ment durable.
2. Une méthodologie établie par la Fédération européenne des espaces protégés (Europarc).