Considérer les diverses fonctions des sols

Les sols : interface dans l’environnement

 

Espaces naturels n°20 - octobre 2007

Études - Recherches

Véronique Antoni
Chargée de mission sol Ifen/Gis sol

 

Les sols sont des milieux naturels, peu connus, leur présence dans le paysage étant occultée par l’occupation du sol. Ils représentent cependant un enjeu important en raison des nombreux services écosystémiques qu’ils rendent. Quelles sont leurs fonctions et comment peuvent-ils être gérés durablement ?

Le sol résulte de la pédogenèse, c’est-à-dire de l’altération des roches sous l’influence conjuguée des facteurs climatiques, des activités biologiques et anthropiques. Il en résulte une grande variabilité de sols, dont le degré de développement diffère selon la durée et la succession de pédogenèses subies. Les caractéristiques physiques, chimiques et biologiques qui en découlent, impliquent des usages et des vulnérabilités spécifiques à chaque type de sol. Un sol limoneux, par exemple, est particulièrement apte à la production agricole, mais également très sensible à l’érosion. Le sol joue un rôle essentiel d’interface vis-à-vis des autres compartiments environnementaux : biosphère, eaux superficielles, substrat géologique et aquifères profonds. De nombreux flux de matières et d’énergie transitent ainsi par le sol : rayonnement solaire, fertilisants, amendements… issus de l’agriculture et de l’industrie. Les sols interviennent également dans les cycles du carbone, de l’azote et des gaz à effet de serre. En dégradant et en minéralisant les matières organiques, les sols stockent ainsi 1 500 Gt de carbone dans le premier mètre des sols du monde.
Le caractère non renouvelable des sols appelle à préserver leurs qualités pour assurer leurs principales fonctions. Les plus évidentes sont perceptibles dans le paysage : les sols supportent les infrastructures développées par les activités humaines et permettent la production alimentaire. Ils assurent un rôle de filtre vis-à-vis des eaux de surface ou souterraines et régulent le stockage de l’eau issue des précipitations. Les sols piègent les pollutions par rétention des métaux toxiques (cadmium, mercure, plomb) ou des micropolluants organiques (HAP, PCB). Ils recyclent également les matières organiques issues des déchets agro-industriels ou urbains. Ils hébergent une réserve génétique et une biodiversité inestimable. Concernant la faune du sol, un sol de prairie permanente recèle, en moyenne, 260 millions d’individus par m2, soit une biomasse de 1,5 t/ha. Quant à la microflore (bactéries, champignons, algues), un gramme de sol peut contenir jusqu’à 600 millions de bactéries. Enfin, les sols ont une fonction d’archivage, car ils conservent la mémoire de toutes les altérations, pollutions, aménagements, changements d’usage et de pratiques agricoles qu’ils ont subis.
La gestion durable des sols passe par la mise en adéquation de leur utilisation avec leurs caractéristiques intrinsèques, et également par la mise en place de mesures ou d’outils réglementaires visant à limiter les pressions exercées sur eux (expansion urbaine, activités industrielles, agriculture…) : les documents d’urbanisme (Plu, Scot), les plans de prévention des risques, les mesures agri-environnementales. La future directive européenne sur les sols permettra de renforcer ces mesures.