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Premières mesures aqua – environnementales

 
Aménagement - Gouvernance

Benoît Pellé
Chargé de mission environnement, PNR de la Brenne

 

À l’instar des contrats passés avec les agriculteurs, ceux passés avec les pisciculteurs sont testés depuis trois ans en Brenne et paraissent prometteurs pour infl uer sur la qualité de l’eau et des habitats naturels.

© PNR Brenne

Les étangs de Brenne connaissent une activité piscicole économiquement fragile. Activité néanmoins essentielle car ils sont tous issus de la main de l’homme. Les premiers furent créés pour la production de poisson à partir du haut-moyen âge. L’étang doit ainsi être continuellement géré, entretenu, sous peine de se combler et de disparaître, et avec lui les espèces qui lui sont liées. Si les pratiques piscicoles ont évolué au fi l du temps, certaines apparues dans les années 50 et destinées à augmenter la production, ont impacté négativement le milieu naturel, à l’instar des pratiques agricoles. Ceci étant, ces pratiques sont globalement révolues - même si toutes ne sont pas favorables à la biodiversité - et la production piscicole actuelle reste qualifi ée d’extensive.

 

 

 

UN ENJEU ÉCONOMIQUE ET ÉCOLOGIQUE

Aujourd’hui, la pisciculture concerne environ 300 exploitants qui produisent autour de 1000 tonnes de poisson par an, constituées pour moitié de carpes, pour un tiers de gardons, pour le reste de tanches, brochets, sandres, etc. La filière piscicole connaît un certain nombre de difficultés et la production aurait baissé de près de 30 % depuis une vingtaine d’années. Ces difficultés sont liées notamment à la stagnation des prix et à la prédation du grand cormoran, qui affecte la production et entraîne un phénomène de découragement chez les exploitants.
Malgré son entrée dans le programme Natura 2000 dès 1996, malgré l’importance des étangs et de leur gestion pour la biodiversité locale, il faudra paradoxalement attendre 2010 pour la mise en place de premières mesures aqua-environnementales en Brenne. Adaptation locale du cahier des charges national FEP et compromis par rapport au docob, qui allait plus loin dans la prise en compte environnementale, les mesures ont pour objectif une activité piscicole favorable à la biodiversité par le soutien ou l’adaptation des pratiques de production et de gestion de l’étang.

Le pisciculteur volontaire s’engage dans un contrat similaire à ceux signés par les exploitants agricoles (mesures agroenvironnementales) où les coûts ou surcoûts engendrés par les mesures sont indemnisés. Après la réalisation d’un plan de gestion sommaire par le PNR Brenne, le propriétaire/exploitant s’engage pour 5 ans, d’une part à mettre en oeuvre un certain nombre de mesures obligatoires et optionnelles, d’autre part à autoriser le suivi naturaliste des étangs.

BILAN A MI-PARCOURS

Après 3 années de mise en oeuvre, des premières conclusions commencent à s’esquisser.
L’opération se déroule globalement de manière satisfaisante. Elle permet notamment un dialogue direct Parc - propriétaires d’étangs autour de l’environnement et de la production piscicole, et constitue, enfin, une reconnaissance de l’importance cette dernière activité comme levier de conservation du patrimoine naturel de l’étang.
Attendues depuis plusieurs années, les mesures aqua-environnementales initiées en 2010 constituent une véritable avancée dans la préservation de la nature en Grande Brenne. Cette première expérience conciliant pisciculture et environnement reste positive à condition de la considérer comme test grandeur nature, un prélude à une future opération revue et beaucoup plus étendue. Le contact avec les propriétaires engagés est constructif et plusieurs sont d’ores et déjà intéressés pour poursuivre la démarche dans le cadre d’un futur programme.

Quelques limites :
• la contractualisation induit nécessairement un respect des engagements et un suivi administratif ; ce dernier point est considéré comme relativement lourd par les contractants qui n’ont pas encore la culture acquise par le secteur agricole sur ce type de procédure. Un propriétaire a ainsi souhaité renoncer à son contrat, la partie « paperasse » étant jugée trop contraignante.
• le cahier des charges n’est pas aussi adapté à la préservation de la nature que celui réalisé dans le cadre de document d’objectifs Natura 2000 ; en particulier, l’aspect « empoissonnement » qui conditionne le type de production plus ou moins impactante sur le milieu n’est pas prise en compte.
• aucun critère lié à la qualité écologique de l’étang n’est pris en compte dans son éligibilité aux mesures
• le nombre d’étangs contractualisé est encore évidemment bien trop faible pour avoir un impact significatif sur la biodiversité de la Brenne liée aux étangs…
En parallèle des deux autres grandes opérations actuellement réalisées sur les étangs de Grande Brenne, à savoir la replantation de nymphea blancs et la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, les mesures aquaenvironnementales constituent le seul outil permettant d’influer positivement sur la qualité de l’eau et des habitats naturels.