Énaction

 
Le concept d’énaction nous vient de Francisco Varela (1946-2001), biologiste, philosophe et neurologue chilien.
Des mots pour le dire

Michel Lebelle
Doctorant à Paris X (transfert des savoirs experts), ingénieur en stratégie et ingénierie de formation d’adultes, concepteur en ingénierie de formation et pédagogique. Consultant international en dispositif d’ingénierie de professionnalisation.

 

Le concept d’énaction nous permet de découvrir ce qui constitue « la motivation à agir » d’un individu. En effet, l’énaction défend l’idée que la cognition (le processus de l’intelligence) est d’abord incarnée, c’est-à-dire qu’elle prend en compte le fait que chaque individu évolue dans son propre milieu, avec ses propres règles, dans son propre monde.
Comment ? Lors de son activité, le praticien va devoir traiter de problèmes ou encore de nombreuses situations de travail significatives. Dans sa réponse, il sollicite alors plusieurs formes de savoirs : savoirs expérientiels, astuces et tours de main, savoirs liés à l’environnement, savoirs relationnels, savoirs techniques, savoirs procéduraux, savoirs communicatifs, savoirs faire cognitifs. Mais avant d’agir, le praticien va rechercher « le sens à agir ».
Ainsi, lors d’un processus d’in-formation (du latin in formare : former de l’intérieur), il va examiner des données de la situation ou du contexte, rechercher les enjeux et les objectifs de l’action. Puis, par une action réflexive, il va comparer la situation à une multitude de schèmes opératoires passés (son expérience). Il va aussi interpeller sa culture, son système de valeurs.
Et, seulement si la situation est porteuse de sens pour lui, il déclenchera « une motivation à agir ».
Ensuite, il va construire la combinatoire la plus appropriée au contexte d’action en déclenchant le savoir agir : l’acte juste, l’acte opératoire.
L’une des caractéristiques de l’énaction est d’éclairer le fait que la perception et l’action sont indissociables. Ce faisant, ce concept nous permet de porter une réflexion de fond sur le management, en lien avec la gestion des ressources et de l’information. Il nous permet de mettre en évidence que la construction du sens et son partage sont des éléments centraux pour une gestion qualitative des compétences dans une organisation. L’énaction montre aussi que la motivation à agir ne se décrète pas, elle se construit.
On en conclura que la compétence professionnelle est « un potentiel actionnable » qui ne pourra être effectif que si le système d’information est cohérent, transparent et partagé.
Remettre du sens dans nos organisations évitera les dissonances cognitives, autrement dit, l’incohérence entre ce que fait un praticien et ce qu’il pense de son action.