Plan de restauration national pour l’outarde

 

Espaces naturels n°15 - juillet 2006

Gestion patrimoniale

Christophe Jolivet
Ligue pour la protection des oiseaux

 

L’outarde canepetière fait l’objet d’un plan de restauration national. Celui-ci, qui a débuté en 2001, court jusqu’en 2006 où il sera évalué. Il distingue les populations sédentaires du Sud de la France (Provence et Languedoc) et les populations migratrices des plaines cultivées.
Les populations. En 2004, cette espèce de l’annexe I de la directive Oiseaux comptait environ 1 500 mâles chanteurs dont 78 % en région méditerranéenne. Les effectifs sont globalement stables en Provence et en augmentation en Languedoc alors
que la population d’outardes qui s’étendait des plaines de la Champagne-Ardenne à la Dordogne a régressé de plus de 95 % en vingt-cinq ans. 30 % de l’effectif national d’outardes se trouvent dans les dix Zones de protection spéciale (ZPS) qui concernent l’espèce (une en Crau sur 11 500 ha et neuf en plaine cultivée pour 160 000 ha).
Mesures de sauvegarde. Depuis 1990, les actions de sauvegarde reposent sur les mesures agro-environnementales. Elles visent à restaurer et gérer le milieu de vie de l’outarde, notamment par le recul des dates de fauche et de broyage de la végétation dans les luzernières, les prairies et les jachères. En Crau, ces mesures ont aidé à conserver la steppe pâturée par des moutons. Elles commencent à se mettre en place en Languedoc. Malgré tout, le déclin se poursuit dans les plaines cultivées car les aides du pilier 1 de la politique agricole commune ont orienté les exploitations agricoles vers une forte spécialisation des
systèmes de production aboutissant à la perte de la mosaïque cultures/prairies/luzernes nécessaire à la survie de l’outarde.
Rôle des espaces protégés. La Réserve naturelle des Coussouls de Crau est le seul site à outardes bénéficiant d’une protection réglementaire forte en France. Elle accueille 22 % de l’effectif national sur 7 400 ha. Les Conservatoires d’espaces naturels du Centre et du Languedoc et la LPO sont propriétaires d’environ 60 ha de terrain où nichent des outardes. Un Parc naturel régional abrite encore une population d’outardes : Loire-Anjou-Touraine.
Stratégie. Les connaissances scientifiques acquises par le CNRS de Chizé depuis 1995 (voir article p. 28-29) ont permis d’asseoir la stratégie du plan de restauration national. L’éla-boration d’un nouveau plan devrait associer plus fortement le ministère de l’Agriculture, concerné par la gestion des mesures agro-environnementales et des aides de la Pac.
Le plan de restauration national identifie trois axes d'action :
- la mise en place de mesures de gestion agro-environnementales en Crau, en s’appuyant sur la Réserve naturelle ainsi que sur les espaces agricoles alentour ;
- la gestion favorable des sites à outardes en Languedoc et
en Provence (hors Crau). Les mesures agro-environnementales, outil principal, devraient monter en puissance dans un proche avenir, notamment dans les plaines viticoles, pour la gestion des friches herbacées apparues après l’arrachage des vignes ;
- la restauration des milieux dans les plaines cultivées par la reconstitution de mosaïques de cultures, prairies, jachères et luzernes dans le cadre de programmes agro-environnementaux déjà bien lancés (1 600 ha en contrats en 2005 en Centre et Poitou-Charentes) ;
Cette stratégie de restauration est couplée au renforcement temporaire des populations par lâcher d’outardes élevées en captivité. Ce volet (Programme européen Life nature 2005-20091) vise à lâcher 350 outardes dans des ZPS de plaine cultivée où des mesures agro-environnementales sont appliquées par des agriculteurs. Vingt-deux outardes ont été lâchées en automne 2005.