Inventaires naturalistes dans des propriétés privées

 

Espaces naturels n°45 - janvier 2014

Droit - Police de la nature

Olivier Cizel
Juriste

Que les propriétés soient closes ou non, l’unique solution juridique pour déroger à l’accord des propriétaires est de solliciter la préfecture. Point sur les règles à respecter pour entrer sur les propriétés privées lors d’inventaires.

© Wouter Agens

La réalisation, pour le compte de collectivités publiques, d’inventaires naturalistes nationaux (ZNIEFF…), régionaux ou locaux (dans le cadre des SRCE, des SAGE, des PLU, des atlas communaux de la biodiversité, etc.) nécessite souvent de pénétrer dans des propriétés privées. La loi de 1892, qui donne à l’administration la possibilité d’exécuter des travaux publics sur ces sites, est applicable (1) « à l’exécution des opérations nécessaires à la conduite de ces inventaires » ainsi qu’à « la connaissance du sol, de la végétation et de tout renseignement d’ordre écologique sur les territoires d’inventaires ».

Cette loi prévoit que le préfet peut autoriser, par arrêté, des agents publics (services de l’état, établissements publics, collectivités territoriales et leurs groupements…), ou sur délégation, d’autres personnes (associations, bureaux d’études…), à pénétrer sur des propriétés privées pour y procéder à des inventaires, le cas échéant à des prélèvements. Le propriétaire doit dans ce cas les laisser passer. L’arrêté, valable six mois, doit indiquer la date prévue pour l’inventaire et les communes concernées. Cette disposition s’applique aux terrains non bâtis, moyennant un affichage en mairie 10 jours avant le début des opérations. S’agissant des terrains clos, le propriétaire doit être informé 5 jours avant, par courrier.
La loi de 1892 ne s’applique pas (une autorisation du propriétaire sera donc nécessaire) aux cas suivants : pénétration d’une collectivité sur le terrain d’une autre collectivité (domaine privé ou public), entrée dans les maisons d’habitation (inventaires concernant des chauves-souris, des rapaces nocturnes…) et s’il s’agit d’inventaires réalisés par une personne privée, notamment dans le cadre d’une étude d’impact ou d’incidence.
Une circulaire rappelle la procédure applicable (2) et fournit un modèle d’arrêté. A défaut d’avoir été autorisée par le préfet (absence d’autorisation ou refus d’autorisation), la pénétration par des agents sur une propriété privée, même dans le cadre d’une mission de service public :
• peut être refusée par le propriétaire ;
• engage la responsabilité de la collectivité publique en cas de violation de domicile (habitation et son périmètre rapproché) et en cas de dommages causés au bien d’autrui.

Ce n’est qu’en cas de « travaux nécessitant une occupation » (voir ci-contre) que le texte se fait plus exigeant :
• l’arrêté préfectoral doit indiquer les numéros des parcelles et le nom du propriétaire, préciser les travaux en cause, la surface sur laquelle ils portent et la nature et la durée de l’occupation ;
• l’occupation temporaire est alors interdite dans les propriétés attenantes aux habitations et closes par des murs ou par des clôtures équivalentes.
Toutefois, la circulaire précise que l’installation de bornes ou de repères permettant de localiser des placettes témoins, des pieds d’une espèce végétale, des points d’écoute, de comptage ou de capture est régie par une loi spécifique. Dans ce cas, l’arrêté préfectoral doit faire allusion à cette loi et interdire aux propriétaires de déplacer ces installations.

(1) Inadaptée aux prospections naturalistes, celle-ci a fait l’objet d’une mise à jour par la loi démocratie de proximité de 2002.
(2) Circulaire du 2 octobre 2007.