Génie écologique

 

Espaces naturels n°45 - janvier 2014

Des mots pour le dire

Véronique Bobe-Leloup
directrice service ingénierie écologique d’Ecosphère
membre de l’Association française des ingénieurs écologues
 

L’écologie de la restauration et ses applications se sont développées en France ces 20 dernières années avec les chercheurs, les gestionnaires d’espaces naturels, les ingénieurs et bureaux d’études en écologie et les entreprises de travaux spécialisées. Dans la pratique, les activités qui en découlent sont généralement qualifiées de « génie écologique ». Elles comprennent la gestion, la restauration et la réhabilitation des écosystèmes, voire le déplacement d’espèces et de milieux ou encore la création de milieux ; toutes ces opérations étant menées avec un objectif de préservation et d’amélioration de la biodiversité et du fonctionnement écologique.

Ce champ habituel du « génie écologique » doit-il aujourd’hui être limité ou au contraire élargi ? S’il concerne désormais les seules « activités ayant pour objectif de favoriser la résilience des écosystèmes », cela ne risque-t-il pas d’exclure l’entretien courant de milieux n’ayant pas subi de perturbation particulière et les opérations de création et de déplacement de milieux ? A contrario, n’est-il pas problématique d’intégrer certaines opérations de « génie végétal » ou « génie biologique » visant le rétablissement de fonctionnalités écologiques mais se faisant au détriment de la biodiversité (ex : introduction de végétaux non indigènes dans certains projets de phytoépuration et de tenue de berges ou de talus, avec un risque de prolifération) ?
Par ailleurs, ne doit-on pas conserver le sens des mots « génie » et « ingénierie » tels que définis dans les dictionnaires et utilisés dans d’autres domaines comme le génie civil ? En effet, dans l’usage actuel, les prestations d’ingénierie comprennent les études de conception, l’encadrement des travaux ainsi que les audits et évaluations ; mais elles n’englobent pas les travaux en tant que tel. Le « génie » est quant à lui défini comme l’ensemble des connaissances et techniques de l’ingénieur. Dans les débats actuels, il est envisagé de modifier le sens des mots « génie » et « ingénierie » dans leur application à l’écologie. Cela est plutôt source de confusions.


Au-delà des mots, l’essentiel est que les acteurs du génie écologique interviennent avec déontologie sur les milieux et les espèces, en menant les études préalables nécessaires à la définition des enjeux et des objectifs, en affichant clairement les objectifs et les moyens et en conduisant les chantiers dans le respect de la sensibilité écologique des lieux.